Débuter dans le milieu du JdR

En Amérique où tout est possible

Quasiment tous les jours, je reçois des mails de gens qui veulent être publiés dans le secteur du jeu. Ils veulent connaître le secret pour percer, et je ne peux pas leur en vouloir. Ça donne vraiment l’impression qu’il doit y avoir un truc.

Qu’est-ce que vous devriez faire pour devenir un créateur de jeu ? Peut-être pas ce que vous pensez. Si vous envisagez de vous lancer dans la création de jeu, il y a des chances que c’est parce que vous ayez été un MJ pendant longtemps, et que les gens ont vraiment apprécié vos créations. Vous avez développé une pléthore de matériel et votre propre univers et/ou système de jeu déjà entièrement finalisé et éprouvé. C’est formidable. Maintenant, mettez tout ça de côté.

À la place, téléchargez les guides de proposition d’articles de Dragon Magazine ou de Dungeon Magazine. Fabriquez aussi soigneusement que vous le pouvez un article à soumettre, en suivant au plus près la ligne directrice. Envoyez-la, et soyez optimiste.

Pourquoi Dungeon et Dragon ? Ils sont de loin les magazines les plus lus du marché. Même si écrire pour D&D ou du matériel d20 ne vous intéresse pas, essayez de vous faire publier dans un de ces deux magazines si vous voulez devenir un créateur de jeu. La plupart des professionnels du secteur les lisent au moins en diagonale, et n’importe lequel d’entre eux sera impressionné si vous y avez été publié. Dragon Magazine, en particulier, est tout simplement l’endroit le plus indiqué pour percer dans le secteur.

Dungeon MagazineDragon Magazine

Tout le monde n’a peut-être pas démarré là-bas (moi, par exemple), mais beaucoup de gens l’ont fait. Je peux attester, par exemple, que les grands pontes du jeu de rôle de Wizards of the Coast surveillent à la fois Dungeon Magazine et Dragon Magazine, et y cherchent des créateurs de talent. Mettez votre nom sur quelques bons articles là-dedans, et vous aurez fermement mis votre pied dans l’ouverture de la porte. Notez, je n’ai pas dit que vous y étiez arrivés – juste votre pied. Le reste dépend de vous.

Prenez quelque chose de grandiose à quoi vous avez pensé – des nouveaux dons, des nouveaux monstres ou n’importe quoi d’autre, peut-être un scénario particulièrement bon – et proposez-le à un de ces magazines. S’ils n’en veulent pas, proposez quelque chose d’autre. N’abandonnez pas. Quand j’ai dit que vous deviez mettre toutes vos créations précédentes de côté, je ne voulais pas dire tout. Tirez-en quelques bons morceaux et transformez-les en articles. Soyez cependant prêt à changer beaucoup de ce que vous avez créé pour coller aux besoins de l’article et aux souhaits de l’éditeur. Soyez prêt à le réécrire en entier depuis le début. Vous écrivez pour eux, maintenant – ceci n’est pas juste une excuse pour que quelqu’un publie vos règles maison ou un scénario de votre campagne exactement comme vous l’aviez créé à l’origine. Ce qui colle aux besoins de votre JdR personnel n’est pas nécessairement ce qui fera un bon article ou un bon scénario pour Dungeon Magazine.

Maintenant, vous pourriez être en train de penser “Un article dans Dragon c’est bien, mais j’ai créé un univers entier et je suis prêt à l’envoyer à un éditeur”. Eh bien, si c’est ce que vous voulez vraiment, bonne chance, mais vous prenez l’approche la plus complexe face aux obstacles devant vous. Tenter de vendre un univers de jeu entier à un éditeur est probablement la chose la plus dure à faire dans le marché du JdR. Le récent concours de propositions de Wizards of the Coast [où a gagné l’univers d’Eberron (NdT)] a été l’exception à la règle, et non la règle.

Quasiment personne ne cherche à publier de nouvel univers. Et voici pourquoi : la plupart des éditeurs ont monté leur propre maison d’édition parce qu’ils avaient un univers et n’avaient trouvé personne pour le publier. Ils ne sont pas intéressés par votre univers car ils sont occupés à travailler sur le leur. Si vous êtes un auteur non publié, demandez-vous “Pourquoi un éditeur voudrait publier mon univers avant celui d’un auteur déjà édité, ou même avant le sien ?”. La dure réponse est : il ne le ferait pas. Même si c’est génial. C’est pour ça qu’il faut commencer petit – comme avec des articles dans des magazines. Il faut d’abord que vous fassiez vos preuves.

Tous les éditeurs ne sont pas les mêmes

Maintenant, laissez-moi parler un moment du domaine de l’édition de JdR. Pensez-y comme une bascule. Réalisez maintenant que Wizards of the Coast est assis à un bout de la bascule, et qu’absolument tous les autres sont à l’autre bout pour faire contrepoids. Et pourtant Wizards of the Coast est trop lourd pour que la bascule bouge. Voici la formule : si un éditeur d20 sort un livre et vend N exemplaires, Wizards of the Coast vendrait (N fois 10 à 50) exemplaires de ce même livre (et si ce n’est pas du d20 ET pas publié par Wizards, divisez N par deux).

Qu’est ce que cela signifie pour un créateur de JdR qui prospecte ? Ça signifie que vous ne devriez pas penser que tous les éditeurs sont les mêmes. Pas dans l’échelle de paiement, pas dans le nombre d’exemplaires vendus, et pas dans ce qu’ils attendent. Même si vous voulez travailler en tant qu’auteur pour Wizards, vous pourriez travailler dans de meilleures conditions si vous commencez d’abord par un plus petit éditeur. Il est plus facile de se faire remarquer par un éditeur plus petit, et ceux-ci acceptent les propositions et les contributions. Wizards n’accepte jamais les contributions externes – ils ne font que donner des tâches spécifiques à des indépendants. D’un autre côté, vous pouvez découvrir que seul Wizards (et peut-être quelques rares autres éditeurs) paient assez pour vivre vraiment de l’écriture, même à mi-temps. Ainsi peut-être que travailler pour Wizards ou un grand éditeur devrait être votre objectif à terme.

Et quand je dis “travailler pour Wizards”, je veux dire en tant qu’indépendant. Ne vous attendez pas à ce que Wizards of the Coast embauche des créateurs de jeu à plein temps dans les prochaines années.

Si vous recevez une lettre de refus d’un éditeur, ne renvoyez pas de réponse impolie. N’acceptez pas une date limite pour ne pas la respecter ensuite. Ne bâclez pas votre travail. Toutes ces choses vont pousser un éditeur à ne plus travailler avec vous. Qui plus est, le monde du jeu est très, très petit. Si vous coupez les ponts avec un éditeur et que vous ne pensez pas que cet éditeur en discutera avec un autre et lui racontera tout ce que vous avez fait, alors vous ne comprenez pas comment fonctionnent les choses. Les éditeurs se parlent en effet entre eux – même des éditeurs de magazines et de sociétés différents.

Le marché est trop petit pour que nous ne nous connaissions pas. Et si vous faites du bon boulot pour Erik Mona (l’éditeur de Dragon Magazine, et un type vraiment bien), soyez assuré que non seulement il va encore vouloir continuer à travailler avec vous, mais qu’il va parler de vous à d’autres éditeurs. Et si vous avez quelques participations à Dragon sur votre CV, d’autres personnes du marché vous respecteront pour ça. De même, si Erik met en garde les autres éditeurs contre un certain créateur non fiable, cet auteur ne va plus obtenir beaucoup de travail.

La dernière chose que j’aimerais ajouter à tout ça est que lorsque que vous êtes publié, si vous êtes toujours intéressé pour continuer, utilisez le contact que vous venez de vous faire pour avoir plus de travail. Si vous avez travaillé avec un éditeur et que votre projet ou article est terminé, poursuivez presque immédiatement avec une autre proposition ou idée pour voir s’ils en veulent plus. Si vous avez fait du bon boulot, l’avez livré à temps et agi professionnellement, il y a des chances pour que votre éditeur veuille retravailler avec vous (il y a étonnamment peu de gens qui rassemblent ces trois qualités, surtout sur leur premier contrat). Continuez à avancer de nouvelles idées et utilisez le crédit que vous venez de gagner pour avoir un travail, même si c’est avec quelqu’un d’autre.

Tout le processus pour “percer” peut être frustrant et confus. Parfois c’est bien de discuter avec d’autres qui passent par les mêmes choses que vous. Pour aider, Sue et moi avons créé une page Internet : Writers and Editors Workshops (“Les ateliers des auteurs et éditeurs”). Visitez cette page pour trouver des ressources sur comment se lancer, et venez sur les forums pour comparer vos notes avec d’autres qui essaient de percer sur le marché.

S’établir solidement en tant que créateur sur le marché est un processus lent. Même les gens qui ont eu des coups de bol à leurs tout débuts disent que c’est difficile de trouver un autre contrat et de se faire un nom. C’est comme grimper une échelle. Chaque article que vous écrivez est un autre échelon, et une fois que vous en avez grimpé assez, vous pouvez obtenir un contrat pour écrire une partie d’un bouquin, et enfin, finalement, un livre à vous. Être lent et régulier, bien faire, rendre dans les temps du travail de qualité, est la meilleure façon de grimper cette échelle. Bonne chance.

Article d'origine : Getting Started

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Cet article est inclus dans l'ebook PTGPTB n°19, la deuxième partie du rassemblement d'articles sur la création de JdR : Créer son JdR : l'avis des pros.

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