Rétrospective : Authentic Thaumaturgy

Dans les commentaires de la publication d’hier Realistic Vital Statistics, un lecteur du nom de Joe Nuttal note à juste titre que le désir de « réalisme » est apparu bien avant l’Âge d’argent grognardia (en)  (1) de D&D. Je suis complètement d’accord avec lui. L’aspiration à un plus grand « réalisme » est aussi vieille que le JdR lui-même. J’irai même jusqu’à dire que cette aspiration le précède et qu’elle fait partie de l’ADN que le jeu de rôles a hérité du wargame.

Ce qui est intéressant, c’est qu’une partie de ces tentatives de « réalisme », ne concerne pas tant le réalisme au sens propre que la volonté de représenter « fidèlement » quelque chose sous la forme de mécanismes de jeu. Ce quelque chose peut être les dégâts de chute, les distances, les poids, ou alors - comme souvent lors de l’Âge d’Argent - des « lois » dramatiques. Durant l’Âge d’Or, il y eut au contraire une tentative aussi retentissante que controversée d’amener un tel réalisme dans les règles de magie.

Couverture et première page de l’édition de 1978

Publié pour la première fois en 1978 (puis corrigé et augmenté 20 ans plus tard [Par Steve Jackson Games, en 1998, puis 2005 : lien (en) (NdT)]), Authentic Thaumaturgy wiki (en) fut écrit par Isaac Bonewits wiki (en) et publié par Chaosium grog. Son sous-titre provocateur annonçait les « Conseils d’un occultiste professionnel pour améliorer le réalisme des systèmes de magie des jeux de rôles fantastiques ».

Bonewits est souvent cité comme étant « la seule personne ayant jamais obtenu un diplôme de magie de l’université de Californie », une idée qui m’a toujours fasciné. À la fin des années 1960 et pendant toutes les années 1970, il fut un membre important et influent de plusieurs organisations occultes. Ces organisations incluent les Reformed Druids of America wiki (en), au sein desquels il officia en tant que prêtre, et l’Eglise de Satan wiki, bien qu’il quitta rapidement cette dernière à cause de divergences d’opinion avec son fondateur, Anton LaVey. Je mentionne tous ces éléments biographiques, car il est de coutume aujourd’hui de se moquer de la « Panique Satanique »  (2) comme si elle était complètement sans fondement, en particulier pour ce qui concerne notre loisir. Mais la vérité est que dès le départ, les jeux de rôles fantastiques ont attiré des gens possédant un véritable intérêt pour l’occulte, et dont les croyances occultes ont influencé leur façon de concevoir le jeu. Authentic Thaumaturgy en est un des exemples les plus célèbres.

Isaac Bonewits

Je suis passé à côté d’Authentic Thaumaturgy à l’époque, mais j’étais au courant de son existence. C’était un de ces ouvrages, comme Arduin’s Grimoire grog, [un univers de jeu dérivé de D&D en 9 volumes], dont les joueurs plus âgés que je fréquentais n’osaient parler qu’en chuchotant. J’avais le sentiment à l’époque que Authentic Thaumaturgy était un livre de « vraie » magie et qu’il fallait donc l’éviter.

Mais comme bien souvent, la réalité était tout autre. Quand j’ai enfin mis la main sur un exemplaire, je dois admettre que j’ai trouvé le livre très banal. Pas de sombre grimoire, mais plutôt un assemblage de théories sentant l’amateurisme tout en se prenant très au sérieux ; le genre de texte que nous avons tous tendance à écrire. Selon moi cela ne constitue pas une critique à l’encontre d’Authentic Thaumaturgy, qui est - malgré ses défauts - une lecture très intéressante. Je le mentionne pour replacer la réalité et la réputation de l’ouvrage dans son contexte, en tout cas celui dans lequel je l’ai découvert dans les années 1980.

Bien qu’il ait été publié par Chaosium, Authentic Thaumaturgy n’était pas écrit pour être utilisé avec Runequest grog, ni même avec le système [générique de Chaosium, à base de pourçentages, que l'on retrouve dans l'Appel de Cthulhu (NdT)] Basic Roleplaying grog. En fait l’ouvrage n’est pas vraiment conçu pour être utilisé avec un JdR. Bonewits se contente de proposer des théories sur la magie, pouvant être utilisées pour n’importe quel jeu de rôle. Son objectif n’est pas de « convertir » quiconque à sa vision des choses, mais plutôt de donner l’exemple d’une approche « réaliste » de l’occulte, qui puisse être utilisée pour représenter la magie dans un JdR. Pour ce faire, Bonewits donne des exemples de « lois » de la magie, et discute l’essence et les limites de cette dernière. Le tout est écrit d’un ton aride, quasiment académique. Il est certain que Bonewits lui-même croyait à ce qu’il écrivait, mais son style est plus celui d’un enseignant que celui d’un prosélyte.

Couverture de la réédition de 1998

Malheureusement, c’est cette aridité qui limite à mon avis l’utilité de l’ouvrage en tant que supplément de JdR. Comprenez-moi bien : c’est un document fascinant, à la fois en tant que document historique et en tant qu’exploration d’un sujet polémique. Mais selon moi la majorité de son contenu n’est pas immédiatement utile pour ce qui est d’amener une magie « réaliste » dans une partie de JdR. Et comme toujours quand il s’agit de réalisme, je dois admettre que je n’en ai pas vu l’intérêt. Par exemple Bonewits reproche à Gary Gygax la représentation que D&D fait de la magie. Bien que ses arguments se tiennent et que ce système de magie ne soit pas « réaliste » du point de vue d’un occultiste, il oublie que ce système est éminemment jouable. Comme beaucoup des abstractions du système de combat de D&D, son système de magie a survécu parce qu’il marche, et ce malgré tous les efforts de générations de créateurs de jeu qui pensent le contraire.

Article original : Retrospective : Authentic Thaumaturgy

 

Sélection de commentaires

Semiproteus

Il y a longtemps j’ai acheté Authentic Thaumaturgy (l’édition de Steve Jackson Games grog), je l’ai lu, puis il est resté sur une étagère jusqu’à ce que je le vende. Si je me souviens bien, sa magie « authentique » se base sur les modèles des pouvoirs psioniques wiki (en), ce qui a l’air vaguement scientifique, mais devient ridicule quand on connaît la crédibilité des recherches psychiques et paranormales. Ces diatribes sur le « scientisme », et son refus superstitieux d’utiliser des vrais noms de dieux n’aide pas.

Une exploration des croyances religieuses et des traditions mystiques aurait été plus pertinente, et beaucoup plus utile. Imaginez un supplément « GURPS grog Magie Traditionnelle » qui piocherait dans le travail de Mircea Eliade wiki, dans le Rameau d’Or wiki ou d’autres ouvrages anthropologiques pour présenter un assortiment de traditions religieuses, mystiques et magiques du monde entier. C’est peut-être un défi de taille, vu que je n’ai jamais pu m’attaquer au Rameau d’or ou au Chamanisme d’Eliade sans m’endormir. Un créateur de jeu ambitieux devrait s’y coller un bon coup pour notre bien à tous.

James Maliszewski

[Citation de Mike Monaco] > Qu’est-ce que tu veux dire exactement quand tu dis que ce livre « justifie » ce genre d’accusation fanatique ?!?

Je veux dire que les mouvements de panique ne sortent pas de nulle part ; ils ne sont pas juste créés de toutes pièces par des fouineurs. Pour qu’ils prennent de l’importance, il faut qu’ils aient un lien, même ténu, avec la réalité. Soyons clairs : il y eut, pendant les années 1960 et 1970, un vrai regain d’intérêt pour l’occulte, le paganisme et l’ésotérisme en général, qui eut un véritable impact sur la culture populaire, dont le jeu de rôle.

Authentic Thaumaturgy n’était peut-être pas disponible dans toutes les librairies du pays en 1978, mais il a été lu, il eut une certaine influence, et le fait que son auteur soit un occultiste autoproclamé a sûrement contribué à son aura de mystère. Je n’essaye pas de défendre les agissements de celles et ceux qui ont mis l’ensemble des rôlistes dans le même sac sataniste, mais je pense aussi qu’il serait malhonnête de prétendre que ces « fanatiques » ont inventé les relations entre notre loisir et des croyances qu’iels considéraient comme dangereuses et délétères.

Ziggy M

Pour ajouter un niveau de réalisme, les grand.es nécromancien.nes et méchant.es de mes campagnes suivent les rituels du « Book of Black Magic » de A.E Waite wiki (aussi connu sous le nom de Book of Ceremonial Magic), ce qui me permet d’intégrer ce que je sais de l’occulte à mes parties. Une fois, j’ai eu l’idée d’utiliser un de mes jeux de tarot en créant une histoire basée sur les cartes que je tirais. C’était intéressant, mais ça ne donnait pas toujours une histoire cohérente. En revanche ça m’a donné une idée que j’espère pouvoir concrétiser bientôt.

Odrook

J’ai possédé l’édition de Steve Jackson Games pendant quelques années. J’ai trouvé que c’était une perspective intéressante à injecter dans le milieu du JdR, qui donnait alors beaucoup dans l’auto-référence. Je regrette maintenant de ne pas l’avoir gardé, car je pense que les mécanismes pourraient être une bonne base pour un système de pouvoirs psychiques, du moment que l’on ignore la formule compliquée que Bonewits propose pour convertir l’énergie psychique en force physique.

Bonewits propose une astuce pour combiner les idées de ce livre avec la magie vancienne [inspirée des romans de Jack Vance, la magie est basée sur la mémorisation de sorts, oubliés après qu’on les ait lancés. Les premières éditions de D&D utilisent ce système (NdT)]. L'astuce est qu'un.e magicien.ne peut améliorer la complexité et la fiabilité de ses sorts en développant de longs rituels permettant de combiner ses nombreux pouvoirs psychiques. De tels rituels demanderaient normalement des heures, voire des jours, mais Bonewits suggère qu’un.e magicien.ne pourrait utiliser une forme de projection astrale pour accomplir ces rituels dans un plan supérieur (ce qui pour une raison quelconque compresserait le temps, donnant une durée plus raisonnable sur le plan physique). Les sorts seraient gardés dans un état suspendu, prêts à être lancés quand la dernière incantation est prononcée. À mon sens, on a là la « mémorisation de sorts » sous d’autres atours.

Anonymous

[Citation de James Maliszewski] > « je pense aussi qu’il serait malhonnête de prétendre que ces « fanatiques » ont inventé les relations entre notre loisir et des croyances qu’iels considéraient comme dangereuses et délétères. »

Je ne veux pas faire dérailler cette discussion, mais qui a dit que ces gens “inventaient” ces relations ? Voilà ma vision des choses: la panique satanique s’est concentrée sur le JdR, car il était un loisir non-religieux populaire chez les jeunes de l’époque, et de nombreux jeux mentionnaient ou incluaient de la magie, des religions non-chrétiennes, des démons, etc. Je pense que si quelqu’un considère toute mention de ces choses comme dangereuse ou démoniaque, cette personne est fanatique. Soyons clairs, il a suffi de simples mentions de ces choses pour que les responsables de la panique morale déclarent ces jeux sataniques. C’est intéressant que l’on puisse trouver quelques vraies relations, mais elles n’ont eu aucun impact sur la formation de la panique.

Aucun des textes de la « panique satanique » – et j’en ai lu un certain nombre au fil des années – ne mentionne Authentic Thaumaturgy ou Fantasy Wargaming grog [1981] (qui inclut dans ses règles l’astrologie et d’autres formes de magie « authentiques »).


Ils se focalisent sur les JdR les plus populaires – principalement D&D, mentionnant parfois d’autres jeux de l’éditeur TSR grog ou Warhammer grog, et quelques autres jeux comme Powers and Perils grog ou Stormbringer grog.

Mon avis est que la panique morale autour de D&D est aussi fondée que celles qui concernaient Musclor ou les Bisounours (et oui, les mêmes qui accusaient D&D de satanisme avaient aussi une dent contre les dessins animés du samedi matin). Cela n’avait rien à voir avec le « vrai » occultisme, même s’il y avait des joueurs de D&D des années 1970 que ça intéressait aussi, et même si certains éléments de jeu avaient des origines occultes.

Je trouve ça assez malhonnête de dire que la panique satanique est due à de vraies relations entre le satanisme et D&D. C’est du révisionnisme.

Anonymous

Les années qui suivirent la panique furent sûrement les plus propices à l’occultisme « authentique » dans le JdR. Nephilim grog, un autre jeu Chaosium [traduit du français (NdT)], se vantait d’avoir un système de magie qui avait reçu l’approbation d’un druide, ou quelque chose comme ça. Mais il a été publié quelques années après la mort de Bonewits, donc ce n’était probablement pas lui. Je n’ai pas trouvé ce JdR très intéressant.

Et le supplément GURPS Vaudoo grog incluaient des informations assez précises sur le Vaudou, des exemples de symboles vévé, et un système pensé pour simuler des rituels et cérémonies de magie vaudou.

Richard

On devrait discuter plus sérieusement de Nephilim un de ces jours. C’est un bouquin intéressant, même si selon moi le passage de l’intro qui dit qu’ils ont « travaillé avec un occultiste, vrai de vrai promis juré » ressemble beaucoup à une histoire de « vieux journal intime trouvé dans un grenier ». Pas vraiment un mensonge mais plutôt une référence littéraire ou un exercice de style propre au genre.

Eliade est intéressant, mais Durkheim affirme qu’à des fins d’analyse, on ne peut pas séparer sur le plan anthropologique la magie d’un côté et la religion de l’autre. J’ai bien peur d’avoir tellement assimilé cette idée que je trouve toujours bizarre de séparer les prêtres et les magiciens autrement que par leurs traditions différentes.

Je cesse de troller... Il me semble que l’occultisme est lié au JdR autant qu’à la musique métal ; ils se sont développés main dans la main, même s’il n’y a pas vraiment de bonne raison pour ça.

Talysman

Je n’ai pas lu l’édition originale d’Authentic Thaumaturgy, seulement la réédition de SJG, mais il me semble que Bonewits prétendait que son livre marchait surtout avec Chivalry & Sorcery grog. Il s’agit d’un système de compétences sous la forme de pourcentages, basé sur la conception de la magie psionique qu’il développe dans son livre, Real Magic.

Je n’ai pas rencontré Bonewits quand il était jeune, mais beaucoup plus tard, alors qu’il fondait Ar nDraiocht Fein [une organisation néopaïenne œcuménique se réclamant de la tradition druidique (NdT)]. Il n’était vraiment pas du genre « satanique » et était très critique de ceux qui se sont frottés au satanisme, comme l’auteur de tous ces livres sur la magie runique  (3) . J’ai l’impression que sa phase « satanique » eut lieu quand il était adolescent, et qu’elle ne dura pas longtemps. À l’entendre, il ne fut membre de l’Église de Satan que pendant une grosse semaine avant de se faire exclure, mais ça lui suffit pour se rendre compte que ce n’était qu’une excuse pour la consommation de drogue et les idéologies politiques fascistes  (4) .

J’ai toujours considéré Bonewits plus comme un ex-hippie avec un véritable intérêt académique pour l’occultisme, que comme un adhérent du New Age ou du satanisme. Bien sûr, il n’en faut pas plus aux fondamentalistes chrétiens pour l’associer à leurs théories du complot de satanistes tueurs de bébés, mais il s’agit de leur perception, et pas de la réalité. En vrai, il était plutôt sympathique, et pas aussi égocentrique que certains le décrivent.

Faoladh

Bonewits, Greg Stafford grog, Herbie Brennan grog, Paul Hume grog… On trouve beaucoup d’occultistes dans le milieu du JdR. Et ce ne sont que ceux qui affichent ouvertement leur goût pour l’occulte/ésotérisme. C’est absurde de penser que, juste parce qu’on se bat contre des démons dans D&D, ce jeu est « satanique ». Mais quand on pense ça, on trouve facilement de choses qui vont dans le sens de cette opinion, contre toute raison.

Il y avait une sorte de débat dans Interactive Fantasy (Un magazine  (5) qui n’a pas duré longtemps, et qui essayait de publier des articles [de réflexion] sur le JdR sous une forme académique) à ce sujet durant les derniers temps de la Panique. Un contributeur affirmait que Nephilim, en particulier (avec d’autres jeux comme Vampire : la Mascarade grog et Timeship grog), « avait franchi la ligne rouge », et faisait qu’il était plus difficile de nier tout lien entre JdR et occultisme. Et pourtant quelques années plus tard le JdR et l’occultisme sont toujours deux choses différentes, et plus personne ne croit à ces choses-là de nos jours.

Banshee

Le Rameau d’Or est super en tant que répertoire d’histoires et d’idées, mais il n’est malheureusement pas très fiable. De nombreuses sources sont mal interprétées, pour avancer la théorie de l’auteur selon laquelle le christianisme (en général) et le catholicisme (en particulier) sont un culte païen de la fertilité et des sacrifices, comme toutes les autres religions sauf le bouddhisme.

Les auteurs de l’époque victorienne avaient une fâcheuse tendance à tout généraliser, donc tous les héros finissent par être des « figures solaires » ou des « dieux de la fertilité mourants », et toutes les déesses se retrouvent amalgamées dans « la Déesse qui est aussi toutes les femmes ayant jamais existées »  (6) .

Cabell, Eddison, Graves, Campbell, et de nombreux mouvements néopaïens partagent ces généralités. Plus ou moins du monothéisme en fait.

Ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de textes intéressants sur le folklore. Mais il faut se pencher sur les sources primaires pour obtenir de vraies infos (c’est-à-dire regarder les notes de bas de page, et aller voir si elles disent bien ce que l’auteur prétend), et il faut rechercher des sources secondaires venant de points de vue académiques différents si on veut autre chose que la caricature de ce que les gens croyaient.

Reverance Pavane

Si vous voulez un exemple réussi de magie rituelle, je recommande GURPS Cabal grog de Ken Hite. Son adaptation de Nephilim pour le marché américain a aussi beaucoup de qualités, et ça aurait été intéressant de voir ce que ça aurait donné si ce jeu s’était vendu.

Furry Pirates grog évoque aussi très bien les croyances magiques du XVIIIe siècle, même si c’est surtout dû à la qualité de l’univers. Je suppose que Victoriana grog, avec son système de magie contrôlée par des guildes/sociétés, qui accordent des permis pour pratiquer la magie noire, pourrait s’en rapprocher.

J’aime aussi beaucoup la magie rituelle dans Torg grog (qui est décrite dans le supplément Orrosh). Ses mécanismes représentent brillamment ce genre de pratiques magiques, tout en les intégrant au système robuste au cœur du jeu. [« Il existe peu de sorts connus en Orrosh. Les sorts occultes sont créés en fonction de l’effet désiré, de l’occultiste, et de la cible »]

Je dirais aussi que le système de D&D est non seulement jouable, mais qu’il est aussi très difficile de réussir à le modifier, ce qui a contribué à sa longévité.

Une des modifications les plus courantes apportées au système consiste à introduire un système de points de mana (ce qui était très à la mode à une époque). Mais il est aussi très difficile d’équilibrer un tel système, car on ne peut pas se contenter de dire « les sorts de niveau n coûtent n points de magie ».

Une chose intéressante, c’est que nous n’utilisions pratiquement jamais l’idée que les magicien.nes devaient « étudier des grimoires magiques » comme une façon de limiter les pratiquants de la magie. Si ton personnage avait un sort écrit sur sa fiche, iel connaissait ce sort et pouvait le lancer. Les jeteurs et les jeteuses es de sorts récupéraient leurs sorts à une heure fixe – en général à minuit (« l’heure magique »). Parfois ça changeait (le lever ou coucher du soleil, midi) pour créer des effets poétiques. C’est un héritage de la première édition de D&D, mais on l’a gardé en passant à AD&D parce que c’était plus facile et simple.

D’autres gens ont tenté l’approche de Champions grog, en réduisant les sorts à des effets de base, auxquels on peut rajouter des effets supplémentaires, pour arriver à un total qui détermine le niveau du sort. Ça marche, et j’ai vu d’excellentes analyses basées sur cette idée, mais j’ai toujours trouvé plus facile de me demander « est-ce que ça a l’air d’un sort de niveau n ? » et « tient-il la comparaison avec les autres sorts de même niveau? »

Mais si on change aussi profondément le système on finit par ne plus jouer à D&D, vu qu’il faudra introduire d’autres mécanismes dans le jeu (comme les compétences), ce qui va à l’encontre du principe « pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? »

En plus, ça demande vraiment beaucoup de boulot de recréer un système de magie complet. Ou de le créer en premier lieu.

(…)

Christopher Helton

Je suis surpris que personne n’ait mentionné Greg Stafford et Runequest en parlant des relations entre le JdR et l’occulte. Stafford a été une figure importante du chamanisme et des milieux païens aux États-Unis, ayant publié plusieurs magazines sur ces sujets, en plus des nombreux JdR sur lesquels il a travaillé pendant plusieurs décennies.

(1) NdT : Selon l’auteur, période allant de 1984 à 1989, appelée ainsi par opposition à l’Âge d’Or des débuts de D&D (1974-1983) [Retour]

(2) NdT : Période d’hystérie collective des années 1980 et 1990, quand le JdR fut accusé d’être un complot sataniste visant à corrompre la jeunesse américaine. Si vous voulez en savoir plus, retrouvez notre e-book ptgptb sur le sujet. [Retour]

(3) NdT : référence probable à Stephen Flowers, un auteur ayant beaucoup écrit sur le sujet des runes, et qui fit partie du Temple de Set, un groupe dissident de l’Église de Satan. [Retour]

(4) NdT : Concernant l’idéologie politique de l’Église de Satan (ÉdS): dans sa célèbre Bible Satanique, Anton LaVey emprunte beaucoup (en les édulcorant beaucoup) à Might is Right, brûlot proto-fasciste, sexiste et raciste, ainsi qu’à l’objectivisme de Ayn Rand, une philosophie ultra-individualiste et hyper-capitaliste. L’ÉdS a depuis pris ses distances avec les idées de son fondateur, militant surtout pour la laïcité et les droits LGBT aux États-Unis. Leur compte Twitter est hilarant. [Retour]

(5) NdT : Nous avons traduit plusieurs articles de ce magazine. Rejoignez-nous pour en traduire d’autres ! [Retour]

(6) NdT : Si l’histoire des religions vous intéresse et que vous voulez en savoir plus sur les théories dont on parle ici, nous vous conseillons la chaîne YouTube C’est Pas Sourcé [Retour]

Note: 
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Traducteur: 

Pour aller plus loin… chez PTGPTB

  • Un article de John H. Kim, proposant des alternatives plus mystérieuses aux systèmes de magie très rigides de D&D (et de nombreux autres JdR fantastiques).

  • Le rapport Pulling : les accusations conspirationistes de la Panique Morale

 

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