Une vie de chien (de guerre)

La grande variété d’aventures que peuvent apporter les périodes de guerre.

Il y a en ce monde bien peu d’événements avec le potentiel dramatique de la guerre. Cet article explore la diversité d’amorces d’aventures possibles pour des PJ pendant une période de conflit, et pas seulement les plus évidentes d’entre elles : les batailles rangées en terrain découvert. Disons-le : bien que les batailles, petites ou grandes, se trouvent sur toute liste d’actions militaires possibles, il y a bien plus que des batailles durant une guerre. Les soldats passent pas mal de temps à d’autres activités, telles que reconnaissances, raids, sièges ou service de garnison. Non pas que je sois contre le simple combat –les aventures en temps de guerre en ont besoin, et les batailles, les embuscades, les massacres et les déroutes peuvent générer des aventures très palpitantes et passionnantes. Mais il y a plein de choses en dehors des batailles qui peuvent fournir une excellente matière première pour des parties en temps de guerre.

Bien que la plupart des exemples donnés se rapportent à un monde médiéval- fantastique, cet article devrait se révéler utile pour les MJ pour tous les genres.

Votre pays a besoin de vous !

Au Moyen Age, les armées n’étaient pas entretenues en temps de paix, lorsque les seules forces organisées dans les environs étaient les garnisons des châteaux et les suites des nobles. Les troupes étaient levées si un seigneur voulait entrer en guerre, et alors seulement. Divers moyens étaient employés pour se procurer des soldats, et vous pouvez choisir celui qui " encouragera " le mieux les joueurs à entrer dans une armée. Devenir soldat peut être une aventure en soi.

S'engager dans une compagnie de soldats, pour servir contre une solde, la nourriture, la boisson et le gîte, pourrait rebuter et faire fuir les PJ. Mais cela peut paraître une proposition sacrément attirante durant des temps de famine, de luttes politiques, ou lorsque toute autre menace accable le royaume. Il y a aussi les perspectives plutôt alléchantes de butin, qui devraient intéresser même les personnages dont les besoins vitaux sont satisfaits. Des PJ respectables ne goûteront peut-être pas l’aspect " viol et pillage " de la chose, mais dépouiller un ennemi diabolique de ses babioles brillantes est certainement une activité acceptable ?

Qu’ils soient affamés ou cupides, vos joueurs pourraient découvrir que leur premier défi est d’entrer dans l’armée. Au XVème siècle, les contrats des capitaines spécifiaient souvent que l’on devait rassembler des troupes équipées et capables. Un capitaine PNJ dans une telle situation voudra ainsi enrôler des PJ ayant l’expérience du combat et remplissant ces conditions. Vos joueurs sauront-ils faire leurs preuves ? Une ou deux épreuves seraient-elles à l'ordre du jour ? Ou peut-être le capitaine a t’il d’autres idées sur la manière dont ils pourraient s’insinuer dans ses bonnes grâces, un petit travail qu’ils pourraient faire pour lui ?

Comme les groupes de PJ ont tendance à être de petite taille, le capitaine pourrait être un spécialiste cherchant simplement une poignée d’assistants : par exemple, un ingénieur qui veut un petit détachement pour escorter une machine de guerre nouvellement construite, ou combattre à travers les tunnels que ses mineurs ont construits sous les murailles d’un château : "Vous avez déjà combattu dans des souterrains, les gars ? Vous êtes exactement ceux dont j’ai besoin. 'Feriez mieux d’emmener ces lanternes avec vous".

Une autre possibilité est que le capitaine recruteur soit un petit noble cherchant à grimper dans l’estime du souverain, mais sans grandes possibilités question argent. En temps de guerre, quand on est riche, c’est facile de plaire à son suzerain : il suffit de lui remettre de l’argent. La manière difficile est de faire quelque chose, si possible d’audacieux et de réussi, qui soit remarqué. Ce genre de leader ambitieux peut fourrer les PJ dans toutes sortes de pétrins, portant la compagnie volontaire pour les missions dangereuses à chaque occasion, et étant, en général, hyperactif. Le capitaine recruteur pourrait même être un PJ, une façon intéressante d’introduire un nouveau venu dans une campagne existante.

Un noble pourrait même engager les PJ sans les mener à la guerre. Selon le droit féodal, les vassaux devaient un service militaire à leur seigneur, mais n’avaient pas toujours à le fournir eux-mêmes. Un PNJ noble à court de soldats, ou qui préférerait les garder vivants à la maison, pourrait engager des PJ convenablement équipés pour remplir ce devoir. De tels PJ pourrait bien se retrouver à agir comme une unité indépendante, vêtus de la livrée de leur employeur, pourvu qu’ils obéissent aux ordres du général désigné par le dirigeant. Opérer seul est, après tout, le modus operandi habituel durant les parties.

La conscription, ou le recrutement forcé sont le meilleur moyen de -ne pas!- obtenir l’adhésion loyale des PJ à une cause. Si votre campagne se déroule dans un pays au gouvernement autoritaire, ou dans un empire décadent, les capitaines pourraient ne pas se soucier de savoir si les recrues veulent servir, ou même si elles en sont capables, du moment qu’ils remplissent leurs quotas. Cela peut surprendre, mais ce genre de recrutement peut être un premier contact amusant avec la carrière militaire des PJ. Et comme de coutume pour certains rôlistes, une auberge est le meilleur point de départ.

Un capitaine recruteur, avec une bande d'hommes de main baraqués, pourrait trouver qu’il est plus simple d’attendre à la sortie d’une brasserie que de pauvres âmes ivres en sortent en titubant. Mieux, il pourrait abreuver les PJ lui-même, garantissant ainsi leur ébriété. En fait, s’il paye le tenancier de la "taverne à picole " pour être généreux sur la bière, il n’aura même pas besoin d’être présent. C’est assez stupéfiant l’effet que peut avoir un peu de liqueur versée dans beaucoup de bière. Même le plus réfractaire des PJ se réveille simplement le matin suivant avec mal au crâne et un nouveau métier ! Bien sûr,  bon nombre des soldats ainsi gagnés sont susceptibles de tenter de déserter, et leur qualité au combat est discutable. Mais les déserteurs capturés s’exposent aux plus sévères des châtiments, et en temps de guerre, on doit faire des exemples. Ordonner aux PJ d’assister, avec le reste de l‘armée, à un tel châtiment pourrait le leur enfoncer dans le crâne. Mieux encore, s’ils tentent eux-mêmes de s’échapper, laissez-les découvrir combien leur officier peut être imaginatif lorsqu’il s’agit de mettre au point des punitions.

Même les prisonniers peuvent être recrutés en temps de guerre, spécialement ceux ayant l’expérience du combat. Les dirigeants préfèrent souvent engager de tels scélérats plutôt que leurs sympathiques et productifs sujets, qui payent leurs impôts. Cela offre une solution bienvenue aux MJ coincés avec un groupe de PJ emprisonnés. Reconnaissons-le, bien des groupes de PJ ont tendance à mal se conduire. Cela permet aussi aux MJ de mettre en scène des officiers PNJ désagréablement  intéressants, et de donner aux PJ les missions vraiment dangereuses (ou stupides ?) que les soldats normaux refuseraient (1). Et mieux encore, une unité de détenus pourrait être tenue à l'écart du reste de l’armée dans une tentative pour maintenir la discipline. Cela signifie (encore une fois) que les PJ pourront opérer seuls.

Les volontaires sont bien plus adaptés aux unités d’élite, et ceux de statut social supérieur pourraient regimber à l’idée de servir parmi les soldats du commun. Incorporés à une compagnie de gentilshommes volontaires, comme les célèbres Trois Mousquetaires, ils auront tendance à opérer plus indépendamment et à accomplir de hauts faits, poussés par leur honneur plutôt que par le désir d’être payé ou la peur du châtiment.En outre, c’est tout à fait le genre de types que les commandants détachent de l’armée régulière pour remplir les missions les plus intéressantes. De tels PJ pourraient s’associer à une armée pour une cause, tout comme les croisés historiques s’assemblèrent pour rejoindre les expéditions vers la Terre Sainte. Peut être quelque grand mal menace-t’il le pays et souhaitent ils rejoindre le camp du bien (déjà entendu ça quelque part ?)

D’un autre côté des PJ plus mercenaires pourraient s’engager simplement en tant que tel –mercenaires. De nouveau, cela leur sera particulièrement facile s’ils ont une réputation de combattants courageux ou habiles, et leur donnera plus de contrôle sur leur propre destin. Des PJ malins choisiront sûrement de servir le camp qui paye le mieux, Tout en gardant à l’esprit qu’il reste possible de déserter si l’ennemi augmente son offre. Finalement, ils doivent s’assurer qu’ils sont du côté des vainqueurs – crucial s’ils veulent s’amuser à dépenser leur argent après la guerre !

Il est possible que volontaires et mercenaires ne se voient pas imposer un officier les contrôlant directement, surtout si une telle indépendance était une des conditions de départ de leur contrat de travail. A nouveau, cela augmente les possibilités de roleplay d’une telle unité, car elle agira plus comme un groupe de PJ normal. Il suffit de remplacer : " Vous êtes assis dans une taverne lorsqu’un homme vêtu de noir se glisse vers vous avec une proposition" par " Vous êtes assis dans la caserne lorsqu'un sergent vêtu de rouge s’avance crânement vers vous avec un ordre ". Facile !

Vos PJ pourraient même être obligés de servir dans l’armée, comme dans l’Angleterre de la fin de la dynastie anglo-saxonne (2), tout homme physiquement apte âgé de 16 à 60 ans devait servir si le pays était envahi. Même des PJ non combattants pourraient ainsi se trouver recrutés. Comparée aux soldats d’élite des levées triées sur le volet, la masse d’homme des Fyrds anglo-saxons n’étaient pas très bien équipée, armés de piques et de dagues, et tout au plus protégés par une veste de cuir et un bouclier de bois (3). Des PJ voleurs ou filous colleraient certainement à ces critères ! Des commandants d’armée sensés, toutefois, tenteront d’utiliser les capacités spéciales des PJ. Des voleurs peuvent détrousser l’ennemi, par exemple en maraudant des objets magiques nécessaires à ses machinations. Les filous, les trafiquants, les amuseurs, … peuvent infiltrer le camp ennemi comme espions et saboteurs.

"Alors, Des volontaires ?"

Les PJ ne devraient vraisemblablement pas être incorporés dans une unité de ligne. D’abord parce qu’à cause de leur expérience de l’aventure, ils sont probablement un peu différents des soldats ordinaires. Certains d’entre eux n’ont même pas besoin de se voir fournir épées ou fusils – ils ont leurs propres petits bijoux ! Ensuite, les possibilités d’aventure seraient restreintes. Si les PJ forment une petite unité d’élite, alors ils se verront attribuer des missions plus intéressantes. Cela ne signifie pas que l'on attende des PJ qu'ils affrontent seuls des armées entières d’ennemis, à moins que le jeu ne soit de la fantasy vraiment épique. Ils rencontreront peut être l’armée ennemie, bien sûr, mais l’aventure sera plutôt faite de manœuvres d’évitement, de déguisement ingénieux et de subterfuges, que d’une longue série de rencontres guerrières. Toutefois, s’ils sont obligés de combattre pour s’échapper, préparez les dés.

Assez parlé de l’incorporation dans l’armée. Passons maintenant à ce qu’ils pourraient faire une fois qu’ils ont intégré ses rangs.

" Assez," pleuraient-ils "On n'en peut plus !"

Une armée récupérant son approvisionnement en chemin peut vraiment répandre la destruction sur le pays traversé. En fait, les grands raids le long des voies d’approvisionnement du territoire ennemi faisaient partie des stratégies de base au Moyen Age. Ils nourrissaient une armée sans utiliser les ressources alliées, et maintenaient les soldats heureux grâce au pillage. Tout aussi important, ils défiaient l’autorité du dirigeant ennemi, en ébranlant le soutien de la populace envers un dirigeant qui a échoué à les protéger.

Vous pourriez inverser l’idée, avec des villageois engageant les PJ pour les défendre des raids des soldats. Les PJ  pourraient être surpris de découvrir que ces mêmes soldats sont du côté des gentils

Le simple fait de maintenir une armée approvisionnée occupe en permanence de nombreux soldats. Du fait du besoin en provisions, une armée n’est pas toujours rassemblée dans un camp unique. Elle peut être répartie entre les fermes et les villages environnants. Cela peut conduire à des tensions lorsque les soldats mangent les réserves de nourriture, et que les habitants font face à la perspective de la famine. Des troubles peuvent se produire, même si les commandants de l’armée prévoient de dédommager les civils – des paysans affamés ne mangent pas de promesses. Les soldats tapageurs, ivres ou voleurs ont aussi tendance à porter sur les nerfs des civils ! A la suite de tels griefs, les habitants pourraient trouver le courage de s’unir pour protéger leurs biens, attaquant tout soldat qui tenterait de prendre de la nourriture ou des animaux.

Durant la Guerre Civile anglaise [1641-1651], des bandes appelées " porteurs de massue " (clubmen) apparurent dans certains comtés et utilisèrent la force pour s’opposer aux ravages des armées, leur loyauté changeant selon quel camp menaçait le plus leurs propriétés. Parfois, ils s’opposaient à toute force s’approchant. De tels développements peuvent créer des scénarios intéressants, avec plein de perspectives pour des combats à petite échelle, aussi bien que pour de la réflexion et de la diplomatie. Si les PJ sont trop gentils pour causer eux-mêmes les ennuis, alors peut être que ce seront les singeries d’une unité alliée stationnée à proximité qui les déclencheront. Comment les PJ s’y prendront-ils avec de tels coquins, techniquement du même côté qu’eux ? Compliqué !

Et si des prises d’otages, des situations désespérées et des agitateurs ennemis sont ajoutés au mélange, alors les choses vont devenir encore plus compliquées.

Nous devons nous débrouiller seuls

A la suite de telles missions de fourragement, les PJ pourraient se retrouver séparés de leur armée. Des PJ réticents, le genre qui ne s’embête pas avec tous ces cris et ces battements de tambour, pourraient simplement être laissés derrière ! Et même si les PJ restent avec l’armée jusqu’à ce que la victoire soit assurée, ils devront toujours rentrer chez eux après ça. Quelle que soit la manière dont ils ont été séparés, les PJ pourraient avoir des problèmes. Un exemple tiré de l’histoire peut se révéler intéressant.

En rentrant de croisade, le roi Richard Cœur-de-Lion tenta de traverser l’Autriche, un pays dirigé par des gens qui lui étaient hostiles (le roi avait récemment insulté le duc d’Autriche). Avec seulement une poignée de compagnons, il décida de voyager à travers les terres sous l’apparence de pèlerins revenant de Jérusalem. Ils allèrent d’ennuis en ennuis, leur nombre diminuant jusqu’à ce que le roi n’ait plus avec lui qu’un garçon parlant allemand et un autre serviteur. Alors que le garçon allait chercher des provisions, il dépensa un peu trop d’argent pour un humble pèlerin, et fut surpris avec les gants du roi passés à sa ceinture ! Capturé par des seigneurs locaux soupçonneux, il révéla finalement où se trouvait le roi. Ainsi débuta la célèbre captivité du roi Richard en Allemagne. Vos PJ feraient-ils des erreurs aussi stupides, et finiraient-ils par devoir s’échapper de prison ? Leurs fausses oreilles tromperaient-elles même un enfant elfe ?

Le blanc de leurs yeux

Évidemment, les batailles sont une composante majeure de la guerre, mais souvent évitées au Moyen-âge de par leur nature imprévisible et radicale. Le roi Henry II d’Angleterre défendit victorieusement son vaste royaume des incursions et parvint même à l’étendre sans aucune bataille rangée durant toutes les années de son long règne. Les raids et les sièges étaient bien plus courants au Moyen Age, car perçus comme des stratégies plus sûres que les batailles rangées. Mais ces dernières se produisaient encore assez souvent, ainsi lorsque les forces assiégeantes étaient forcées au combat par une armée de secours, ou lorsque les chefs de guerre pensaient que les chances étaient de leur côté. Il y avait même la croyance répandue qu'une bataille rangée était la fin appropriée d'une campagne. En d'autres temps, comme au début de l'ère moderne, la bataille rangée était considérée comme la forme ultime de la guerre. Considérons la bataille ouverte en gardant ceci à l'esprit. Vos joueurs voudront certainement que leurs PJ aillent au combat à un moment de leur carrière militaire, et vous n'avez pas envie de les décevoir.

Si les PJ finissent au milieu d’une bataille, vous et vos joueurs devrez alors utiliser votre bon sens pour vous sortir agréablement de l’expérience.Ce serait une honte de transformer une expérience aussi potentiellement excitante, colorée et pleine de tension en de vulgaires jets de dés. La meilleure façon de procéder est sans doute de se concentrer sur l’environnement immédiat des PJ, en terme de possibilités d’héroïsme et d’actes désespérés, tout en décrivant seulement ce qu’ils peuvent voir autour d’eux.Les PJ peuvent encore avoir la possibilité de modifier le cours de la bataille – s’ils se trouvent là où il faut être (par exemple devant une brèche dans les lignes ennemies), ou en face de quelqu’un ou de quelque chose d’important (comme les étendards ou le commandant ennemi). Et n’oubliez pas que les PJ peuvent vivre des accalmies dans le cours de la bataille alors qu’elle va et vient autour d’eux, donnant à chacun le temps de réfléchir et de souffler ; et, plus important, le temps d’avoir un aperçu de la situation générale et peut être de réagir de manière appropriée.

La bataille de Hoth dans l’Empire contre-attaque est sans doute le meilleur exemple de comment maintenir l’attention centrée sur les PJ dans une grande scène de bataille.

Bien que vos joueurs puissent supposer que les PJ vont se retrouver au cœur de la mêlée, il y a d’autres endroits où ils peuvent se retrouver. Des PJ vétérans pourraient être tenus en réserve et, après que vous leur ayez fait un bon récapitulatif détaillé du combat, se trouver trop heureux d’avoir évité le gros de la bagarre.

Les PJ pourraient entrer en action seulement à la fin de la bataille, avec l’ordre de capturer un ennemi important ou un objet dérobé par des pillards. Toutefois, si le camp des PJ est vaincu, l’aventure ne concernera plus que leur fuite, un problème important si l’ennemi ne prend pas de prisonniers. Des PJ loyaux pourraient vouloir s’assurer que leurs dirigeants, leurs commandants ou leurs amis s’échappent aussi.

Une autre alternative à la ligne de front est de faire protéger un convoi de bagages par les PJ, ou qu’ils se voient confier la tâche de garder un PNJ important. Cette dernière option peut devenir difficile si le VIP insiste pour se mettre en danger. À la bataille de Crécy, le roi de Bohème, bien que vieux et aveugle, demanda en un geste chevaleresque à être conduit au cœur de la mêlée afin qu’il puisse porter un coup de son épée. Deux de ses preux chevaliers lièrent leurs propres rênes à ceux de sa monture et firent comme il avait demandé. Tous trois furent promptement occis !

Les PJ pourraient même se voir ordonner de déborder l’adversaire et, prenant avantage de l’absence de nombreux soldats du territoire ennemi, s’y engouffrer et y tenter des missions de spécialiste. Des PJ avides pourraient un peu rechigner à l’idée de passer sans s'arrêter derrière tous les trains de bagage qu’ils découvrent à l’arrière, ce qui pourrait les plonger dans les ennuis, surtout s’ils sont ralentis par une lourde charge de butin !

Huile bouillante !

Lorsqu’ils appartiennent à une armée assiégeante, des PJ explorateurs de souterrains peuvent être envoyés par une galerie de mine nouvellement creusée dans les cavernes sous la citadelle assiégée. Les soldats ordinaires ne peuvent vraiment pas être considérés comme des adversaires valables pour le genre de bêtes qui se tapissent souvent dans les galeries souterraines des forteresses fantastiques. Il y a aussi d’autres moyens d’entrer – des duperies genre Cheval de Troie, ou d’audacieuses escalades nocturnes le long des murs. Des PJ voleurs pourraient se voir ordonner de s’introduire dans le château par le conduit des latrines, exactement comme un soldat courageux le fit pour Philippe Auguste lorsqu’il prit Château-Gaillard aux soldats du Roi Jean dans les premières années du XIIIème siècle. Une mission aussi désagréable pourrait être vue comme une punition après un larcin ! Une fois à l’intérieur, on attend des PJ qu’ils relèvent la herse, qu’ils empoisonnent le puits, ou même qu’ils capturent le commandant de la garnison.

Des PJ du côté des défenseurs ont bien plus de raisons de se battre – ne serait ce que d’être pris au piège ! Si le château est petit, ou si leurs alliés ont eu à répartir largement leurs ressources stratégiques, l’équipe des PJ pourrait se retrouver isolée. Les châteaux du Moyen-âge étaient souvent défendus par une petite troupe de personnes, tel le château de Châlus que Richard Cœur de Lion assiégea en 1199, qui avait seulement deux chevaliers et quelques compagnons à l’intérieur. Un de ces défenseurs, utilisant son arbalète du haut des remparts en s’abritant derrière une poêle à frire, parvint à blesser mortellement Richard. Le roi, croyez-le si vous voulez, était en train de regarder les cabrioles de l'homme avec amusement lorsque le carreau mortel frappa ! Mais des PJ assiégés ont bien plus à faire que de repousser les attaques. Ils pourraient tenter une sortie pour faire passer un message à travers le camp des ennemis. Ils doivent négocier avec les assiégeants, décidant de sujets tels que combien de temps ils attendront une armée de secours avant de livrer la forteresse. Il pourrait y avoir des problèmes à régler à l’intérieur, lorsque les autres assiégés perdent confiance. Si vous voulez vraiment de l’aventure, ils pourraient avoir à faire tout ça en même temps.

Au diable ces jeux de soldats !

Les aventures en temps de guerre ne sont pas toujours basées sur le conflit avec l’ennemi ou la population locale – des conflits peuvent aussi bien surgir à l’intérieur des forces armées. La mutinerie est l’exemple le plus évident ; la paye ou les conditions de vie en étant les causes les plus fréquentes. Quand les fonds ou les sources d’approvisionnement commencent à se tarir, les commandants pourraient commencer à distribuer des menaces ou de vaines promesses pour maintenir la discipline, et parfois les soldats réagissent en prenant eux-mêmes les choses en main. Des rumeurs de mutinerie peuvent aussi apparaître à cause d’officiers impopulaires, ou d’ordres qui laissent présager une mort certaine, et cela peut mener à une aventure.

Dans certaines armées médiévales, les chefs tentèrent de maintenir la discipline en édictant des règlements. En 1190, Richard Cœur de Lion rédigea des règles devant être obéies par ses soldats et les marins durant l’expédition vers la Terre Sainte.

Lorsqu’un homme tuait un autre croisé, il devait être attaché à sa victime et enterré vivant. Si des témoins dignes de foi prouvaient qu’un homme avait tiré un couteau contre un autre et fait couler le sang, alors le coupable perdrait sa main ! De telles punitions pourraient semer le trouble plutôt que de l’apaiser. Et si les PJ subissent la rigueur de la justice militaire, ou s’ils ne peuvent supporter plus longtemps un officier sadique, alors ils pourraient eux-mêmes se mutiner. Vous pourriez vous amuser à jouer de tels chefs – alimentant graduellement le mécontentement de PJ avec de plus en plus d’ordres scandaleux. Des PJ respectueux des lois (ou raisonnables) qui restent loyaux à leurs officiers pendant une mutinerie se verront ordonner d’aider à rétablir l’ordre, de protéger les officiers des troubles, ou de garder les coffres du trésor. A moins que n’apparaisse une révolte majeure destinée à renverser le régime, il est plus sûr à long terme de rester fidèle à ses supérieurs. On traite rarement les mutins avec légèreté !

La désertion est aussi un problème majeur durant la guerre, et on le règle souvent avec sévérité. On faisait souvent des exemples des déserteurs capturés, soit par exécution publique, soit par un douloureux marquage au fer rouge ; ce dernier les marquant à vie comme couards.

"Là , à  l’horizon ! Vous ne voyez rien ?"

Bon nombre de PJ sont parfaits pour le rôle militaire spécifique d’éclaireur,  spécialement les PJ forestiers. Avec seulement un ou deux individus de ce type, tout le groupe de PJ peut devenir un groupe d’éclaireurs. Leur fonction principale est la reconnaissance : se déplacer en avant de l’armée pour réunir des informations telles que la position, la puissance, la composition et l’état des forces ennemies, aussi bien que la configuration du terrain. Comme l’écrit le sage Sun Tzu dans l’Art de la Guerre, si les porteurs d’eau ennemis boivent eux-mêmes avant de remplir les récipients du reste de l’armée, alors les forces ennemies sont assoiffées. Les éclaireurs doivent savoir quels signes subtils rechercher !

En tant que premiers soldats alliés à arriver sur zone, des PJ éclaireurs peuvent se retrouver en situation difficile. Même si les soldats ennemis ne sont pas là, la population elle-même pourrait être hostile. Parfois, une occasion que de courageux éclaireurs ne sauraient refuser croisera la route des PJ. Ils pourraient, par exemple, rencontrer un ennemi de haut rang parti lui-même en reconnaissance. Les PJ  devraient-ils tenter de le capturer ou de l’assassiner ?En 1191, pendant sa croisade en Palestine, le roi Richard I partit chevaucher avec ses seuls faucons et une poignée de compagnons, avec l’intention de capturer quelques sarrasins s’il devait en rencontrer. Toutefois, alors qu’il piquait un petit somme sous un arbre, il fut attaqué. Montant rapidement en selle, il plongea dans la mêlée, mais se retrouva durement malmené, à mesure que d’autres sarrasins arrivaient. En fin de compte, la situation fut sauvée par un chevalier nommé William de Preaux, qui se mit à crier (dans la langue de l’ennemi) qu’il était le roi. Les attaquants, naïfs, se replièrent dès qu’ils eurent capturé ce courageux chevalier ! Vos PJ se feraient-ils pareillement duper ?

L’aspect le plus dangereux du métier d’éclaireur est d’espionner l’ennemi et d’éviter ses éclaireurs et ses guetteurs. Si les PJ sont capturés, ce pourrait être leur tour de révéler des informations ! Mais il y a des avantages à prendre des risques. Des personnages habiles pourraient infiltrer un camp ennemi comme assassins ou saboteurs. Si, par exemple, l’ennemi marche sur une forteresse avec en remorque une puissante machine de guerre assurant la destruction du château, alors il pourrait y avoir quelques feux d’artifice au programme! Des personnages opportunistes pourraient aller directement chercher les coffres du trésor ennemi. S’ils réussissent à en dérober le contenu, l’ennemi pourrait avoir affaire à une mutinerie et une désertion massive, un point utile à aborder si les PJ sont découverts par leur propre camp et doivent s’expliquer ! Les PJ pourraient même rencontrer des déserteurs ennemis souhaitant changer d’allégeance, et faire un brin de recrutement. Toutefois, si les déserteurs sont des alliés, peut-être même les propres amis des PJ, alors de difficiles décisions devront être prises.

Un jour, cette guerre aura une fin

Vous pourriez hésiter à plonger votre monde de campagne dans la guerre, à cause des changements que cela apporte, ruinant peut-être vos notes de background précautionneusement rassemblées. Mais une guerre n’a pas besoin de trop modifier les choses, d’autant plus si les dirigeants actuels sont victorieux. Vous pourriez introduire un conflit à petite échelle, comme une invasion frontalière, ou voir la guerre prendre place dans un pays étranger, deux solutions qui devraient laisser votre zone de campagne relativement inchangée.

La guerre n’impose pas non plus de déterrer les petites  figurines en métal et les mètre-rubans (4), et de laisser l’aspect rôle de côté. Quelles que soient les implications politiques de la guerre, il y a une foule d’aventures à jouer, de toutes formes et types. Avec les accroches d’aventures présentées ci-dessus, même le plus récalcitrant des PJ, terré loin de la ligne de front, ne peut éviter d’être pris dans le flot épique de la guerre, et de produire de grandes histoires. La guerre a pour habitude de jeter directement les soldats dans le grand bain. Vos PJ savent-ils nager ?

Article d'origine : It's a Dog(Soldier)'s Life


(1) NdT : l'archétype de ce groupe étant représenté  dans le film: Les douze Salopards wiki. [Retour]

(2) NdT : Avant la bataille d’Hastings (1066), et le couronnement du Normand Guillaume le Conquérant. [Retour]

(3) NdT : À la bataille d’Hastings, les troupes anglo-saxonnes se divisaient en deux groupes : les Housecarls, infanterie lourde de soldats professionnels, et les Fyrds. Parmi ceux ci, les Select Fyrds, propriétaires terriens devant un service militaire à la Couronne - et dont l’équipement se rapprochait de celui des Housecarls -, et les Great Fyrds, auxquels fait référence cet article. Leur équipement pouvait même se limiter à une armure légère, une coiffe pendante, une fourche et une fronde [Retour]

(4) NdT : Instruments indispensables à tout joueur de wargame avec figurines, avec la table de ping-pong où déployer ses unités, bien sûr [Retour]

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