Traité du zen et de l’art du meneur de jeu chap. 3 : Adaptez-vous aux styles des joueurs

Dans les articles précédents, nous avons traité de ce que peut vous apporter le rôle de meneur de jeu ptgptb et de comment prendre conscience de vos préférences de style quand vous êtes meneur ou meneuse ptgptb.

Dans cet article, je vais aller plus loin avec ce concept et établir les motivations qui font revenir les joueurs et les joueuses autour de la table, avec une série de bonnes pratiques pour aider les MJ à se rapprocher de leurs attentes.

En 2007, j’ai écrit un article dont l'idée principale était à peu près :

À moins que vous n’ayez affaire à un groupe désespérément égoïste, les attentes collectives des joueuses sont plus importantes que les vôtres. Il vous faut adapter vos parties et faire évoluer votre style naturel de MJ pour prendre en compte leurs attentes et besoins. Le temps qu’elles consacrent aux loisirs est trop précieux pour être gâché ou jugé comme « une mauvaise façon de jouer ».

Comme expliqué dans mon dernier article, on peut regrouper les attentes de celles et ceux qui participent à des JdR en huit grandes catégories (tel que résumé depuis différentes sources, en particulier les contributions de Robin D. Laws ptgptb à plusieurs éditions du Guide du Maître de D&D) :

  • Grosbill - Volonté de puissance (Power Gaming): acquérir des nouveaux pouvoirs, les utiliser souvent et efficacement.
  • Bourrin (Butt-kicking): s'amuser avec des combats et écraser des PNJ !
  • Tacticienne : triompher de situations complexes par un plan bien pensé et astucieux
  • Spécialiste : jouer un archétype de personnage similaire encore et encore comme un chat ninja ou un rôdeur elfe noir d’alignement bon.
  • Actrice façon Système Stanislavski wiki (Method Acting) : partir dans l’immersion totale d’un personnage fictif, à n’importe quel prix.
  • Conteur (Storytelling) : explorer le déroulement d’une histoire à partir des choix et actions des personnages.
  • Observateur : se retrouver avec ses amis et puiser dans les énergies sociales du groupe.
  • Instigateur : aimer faire avancer les événements, tirer les leviers, exploser les portes et déclencher des situations gênantes.

Beaucoup de rôlistes trouvent leur motivation dans une seule de ces catégories, mais la plupart piochent dans deux ou plus. Par exemple, mon style personnel tend surtout vers l'instigateur. Je suis aussi très motivé par le bourrinage et le jeu d’acteur, de sorte que je joue généralement des personnages plein de contradictions, souvent déments et bourrins.

Maintenant, un point important. Les joueurs et joueuses ne s’attendent pas à ce que le MJ réponde continuellement à leurs attentes en continu. En général, à moins d’être des tocards, ils ou elles sont prêts à trouver un compromis à la table de jeu pour que chacun s’amuse, à condition qu’une scène importante, en lien avec leurs motivations, soit jouée à peu près une séance sur deux.

Ceci signifie qu’il n’est pas si difficile d’adapter votre style naturel pour retrouver vos joueurs.euses à mi-chemin. Le truc, c’est de faire coller les rencontres (avec ou sans combats) aux goûts de quelques-uns à la fois. Et de vous assurer que vous distribuez les « friandises » équitablement. Cela vous permettra d’obtenir ce que vous attendez des parties, tant que vous distribuez aussi des « accompagnements » qui satisferont les autres.

Avant que je ne détaille chacune des catégories dans la suite de cet article sous la forme d’une liste de conseils précis, il est important qu’en tant que MJ vous acceptiez ceci : aucune de ces motivations n’est inférieure ni ne représente une "mauvaise" façon de jouer. Ce n’est peut-être pas la façon dont vous auriez envie de jouer tout le temps, mais combiner tout ou partie de ces styles fait partie de la définition au sens large du jeu de rôle. Aucune n’est mauvaise ou moins sympa.

D'après mon expérience, si vous avez du mal à accepter cette idée, il y a des chances que vous ayez des difficultés à la table de jeu, que ce soit en ce moment-même ou dans le futur. Hélas, la plupart de ces difficultés seront causées par l’inflexibilité des vos propres attentes, qui entrent en conflit avec celles des autres participant.es. C’est pourquoi je vous encourage fortement à parler du thème et du style de la campagne avec vos joueurs avant qu’ils ou elles ne commencent à créer leurs personnages [C’est l’objet de la session zéro (NdT)].

La recherche de puissance (Power Gaming)

Le Gros Bill de Casus Belli.

Les Grosbills (GB), de manière très élémentaire, cherchent à faire de nouveaux trucs cools avec leur personnage. On désigne ainsi les joueuses et les joueurs qui se concentrent en priorité sur la progression mécanique des PJ pour les rendre plus puissants, efficaces et mortels. Ielles planifient leur progression plusieurs niveaux à l’avance et achètent des suppléments dédiés à leur classe pour en exploiter le contenu. Certain.es adoptent même un comportement issu de certaines compétitions de jeux de cartes à collectionner, s’engageant dans une longue recherche des combinaisons ultimes qui placeront leur personnage au summum de la performance.

Pour répondre aux attentes des GB, vous devriez:

  • Prendre le temps de comprendre comment leurs personnages fonctionnent, au moins dans les grandes lignes.
  • Vérifier et approuver chaque nouvelle capacité ou objet magique, faire l’effort d’imaginer quel impact cela peut avoir sur les parties, et leur dire oui autant que possible.
  • Créer quelques rencontres qui mettent en valeur leurs nouveaux pouvoirs.
  • Rester vigilant pour éviter qu’un enchaînement d’actions dégénère et accapare trop fréquemment le feu des projecteurs au détriment des autres personnages.

Vous devriez éviter de :

  • Casser, voler ou annuler l’effet d’un objet à moins de leur fournir un moyen de le récupérer rapidement.
  • Réduire la puissance d’une capacité au beau milieu d’une rencontre parce que cette capacité permettrait de la court-circuiter. Ça arrive et c’est normal.
  • Les traiter de Grosbill wiki ou les accuser de dénaturer vos parties. Si vous restez sur vos gardes, cela ne devrait pas se produire.

Si votre groupe est majoritairement composé de GB et que vous trouvez difficile de leur proposer des défis à leur mesure, n’hésitez pas à tourner le potentiomètre de la difficulté de quelques crans sans pour autant distribuer plus de récompenses tangibles. Dans cette série d’articles (en) orientée sur la 4e édition de D&D, je partage quelques astuces qui pourraient vous aider.

Le bourrin

Les amateurs de bourrinage forment probablement la catégorie la plus facile à satisfaire dans la majorité des JdR. Ils ou elles s’amènent pour lancer des dés et cogner leurs adversaires. J’ai participé à une suffisamment de parties en convention pour savoir que de nombreuses personnes seront contentes de faire cela 12h par jour. Ne négligez pas ce don des dieux, vous pouvez économiser votre travail de préparation si la majorité du groupe aime bourriner et que vous manquez de temps.

Si ça démange votre groupe de botter des culs, vous devriez :

  • Surveiller leurs niveaux d’énergie et d’attention. S’ils menacent de s’endormir, jetez-les dans une bagarre !
  • Garder une place de choix dans vos parties pour les rencontres de type conflit physique, mais pas forcément la première place.
  • Combiner les types de rencontres pour qu’elles gardent leur fraîcheur et leur intérêt pour tout le monde autour de la table.

Évitez :

  • D'enchaîner des sessions de plusieurs heures sans aucun combat.
  • D’arriver à une partie sans avoir préparé au moins une rencontre de combat, ou au minimum la possibilité d’en improviser une au débotté.

La tacticienne

Ces joueuses adorent planifier. Rien de plus gratifiant pour elles que de voir le plan qu’elles ont élaboré se dérouler sans accroc, telle une mécanique bien huilée, et les capacités des personnages interagir en harmonie. Les tacticien.nes cherchent à obtenir le maximum de ce qui est possible avec le système. Leur plus grand plaisir, c’est quand le moteur du jeu tourne à plein régime et que leurs efforts intellectuels pour résoudre un problème sont récompensés.

Xanatos (en)

En présence de ces généraux d’armées polyédriques, vous devriez :

  • Résister à la tentation de tricher avec les dés derrière votre écran pour « rendre les choses plus difficiles » quand un plan se déroule sans accroc. Dès le début, c’est dans cette optique qu’ils ou elles ont pressé leurs cerveaux comme des citrons.
  • Adapter les scènes pour que les PJ puissent préparer une embuscade ou retourner la situation contre leurs adversaires.
  • Prévoir des rencontres (autres que des combats) sur le modèle de Mission impossible wiki, afin que ces tacticiens puissent révéler leurs talents de Cerveau des opérations, dans des plans dignes d’un gambit de Xanatos tvtropes
  • Introduire des objectifs secondaires dans des rencontres avec combat, pour les forcer à effectuer des choix et gérer leurs ressources limitées.

Mission impossible - Mastermind (1969)

Vous devriez éviter de :

  • Laisser s’installer la paralysie d’analyse wiki. Secouez-les, résumez ce qui vient d’être dit et n’hésitez pas à les éclairer en cas d’erreur d’interprétation.
  • Faire de toutes les rencontres de combat une variante des « Gardes dans une pièce vide ». Ajoutez plutôt à la pièce des éléments interactifs qui pourront être découverts et exploités.

Les spécialistes

Les spécialistes vous envoient un message fort et clair sur ce qu’ils ou elles attendent de votre table. Et ce n’est pas simplement « les rôdeurs drows [= elfes noirs (NdT)] sont trop classe et dark ». Ils ou elles s’attendent à ce que leur personnage ait un rôle marquant dans le groupe, et que ce personnage ait l’air le plus cool possible. Ça peut sembler facile quand on joue un ranger archer mini-maxé, mais c’est loin d’être aussi simple quand on insiste pour jouer un personnage étrange ou sous-optimisé tel qu’un barde muet spécialisé dans la danse du ventre.

Le rôdeur drow le plus célèbre des Royaumes oubliés

Oui, j’en ai vraiment côtoyé.

Pour donner aux spécialistes ce sentiment … d’être spéciaux, vous devriez :

  • Leur préparer des rencontres qui les intéressent ou qui résonnent avec leurs traits uniques. Les chats-ninjas sont là pour infiltrer les châteaux et les bardes-mimes pour… hmm… servir de distraction tandis qu’une foule de PNJ furieux tentent de les lyncher.
  • Intégrer leurs origines (ou celles de leur clan, famille, race…) dans une intrigue clé de votre campagne.
  • Prévoir au minimum un « Moment de Sublime Consécration » à court ou moyen terme pour ces PJ. Plus ce moment approche, plus vous permettrez subtilement au groupe de l’anticiper.

Évitez de :

Les actrices et les acteurs de la méthode Stanislavski

Dans cette vaste catégorie, les joueuses se retrouvent autour de la table pour explorer, découvrir et raconter une histoire, du point de vue de leur personnage. Elles veulent parler par sa voix. Elles vont créer des combinaisons de PJ inimaginables. Elles se délecteront sans doute de surmonter de terribles obstacles, qui feront progresser et s’étoffer les personnages, en profondeur plus qu’en puissance.

Si votre table est une scène, entourée d’actrices, vous devriez :

  • Exiger (de vous et des autres) tolérance et patience à plusieurs reprises, pour que ces joueuses aient le temps de vraiment rentrer dans leurs personnages.
  • Accepter des concepts de PJ “uniques” et diversifiés (qui diffèrent des joueuses par leur genre, leur orientation sexuelle, leur religion…).
  • Adapter certaines scènes pour que votre scénario et les motivations des personnages se rejoignent, et, encore mieux, se confrontent violemment.
  • Les soumettre à de terribles dilemmes moraux ou caractèriels, et les laisser ensuite patauger dans les drames qui en résultent.

Évitez par contre de :

  • Laisser ces joueuses monopoliser l’attention. Un monologue de deux minutes ça passe, mais pas un requiem de quinze minutes à la mort d’un PNJ … sauf si tout le groupe appréciait vraiment ce PNJ.
  • Les interrompre sans nécessité au milieu d’une phrase, ou de vous moquer quand elles parlent par la bouche de leur personnage. Gérez le feu des projecteurs, mais sans être tyrannique.

Mort de Molière wiki

Les conteurs

Il s’agit sans doute du principal sujet de discorde entre MJ et joueurs. De nombreux MJ font l’amalgame entre jouer à un JdR et raconter une histoire. Ce n’est pas la même chose. Je ferai prochainement un article dédié à ce sujet.

Les Conteurs s’attendent à ce que leurs personnages fassent partie de quelque chose de plus grand que la somme de leurs aventures. Ils veulent découvrir un monde qui vit et respire autour d’eux. On inclut dans cette catégorie celles et ceux qui adorent partir en exploration à la recherche de connaissances et de légendes.

Un point de divergence fréquent entre MJ et joueurs est que les joueurs veulent être les acteurs principaux de ce monde, tandis que le MJ considère que le monde qu’il a créé doit être le protagoniste principal. Les joueurs ne veulent pas avoir la sensation d’être de simples abeilles ouvrières dont le travail n’est qu’un vulgaire service de livraison à domicile.

Si des Conteurs se regroupent autour de votre feu de camp, vous devriez :

  • Attribuer à chaque rencontre un rôle significatif dans la trame globale. Vous devez pouvoir expliquer pourquoi toute chose se produit à la lumière de vos intrigues.
  • Pourvoir la plupart des PNJ (y compris des adversaires dans les combats) de buts, de peurs, et de leur propre opinion - que les conteurs pourront découvrir et exploiter. Soyez même prêts à en improviser pour des PNJ mineurs et sans nom, on ne sait jamais.
  • Mettre les PJ intégralement et fondamentalement au cœur de l’intrigue. Faites-en des princes perdus, des seigneurs déshérités ou les descendants de tyrans malveillants.

Évitez :

  • D'enchaîner des combats avec des adversaires lambda. Ces PNJ ont besoin d’une motivation plus complexe que « garder la pièce ».
  • De lâcher les PJ dans un donjon s’il n’est pas clairement lié avec une intrigue plus vaste, ou s’il ne comporte pas plusieurs zones à explorer pour trouver des indices sur l’univers et les intrigues de la campagne.

Les observateurs

Les Observateurs ne posent pas de problème. Quelque soit l'activité pratiquée, ils sont surtout là pour passer du bon temps avec des amis ou faire connaissance avec les autres. Vous devriez concentrer vos efforts sur ce qui se passe autour de la table plutôt qu’en jeu.

Si vous pensez que des Observateurs sont assis autour de votre table, vous devriez :

  • Orienter les parties vers le fun plutôt que le sérieux, vous risquez de ne pas avoir un engagement très important dès les premières séances.
  • Permettre un « temps social » avant le début de la partie. Laissez-les prendre des nouvelles des autres, bavarder à propos de films, de loisirs, de leurs familles… Prévoyez aussi des pauses [café, gâteau, toilette (NdT)] au cours de la partie pour leur laisser du temps ensemble sans devoir tout le temps être concentrés sur la partie.
  • Être tolérant envers l’usage des appareils électroniques, le manque de concentration et les discussions occasionnelles entre geeks.
  • Suivre l'évolution des observateurs : avec le temps, beaucoup cessent de juste observer et se trouvent motivés par d’autres aspects de la campagne.

Évitez :

  • D’insister auprès des personnes pour qu'elles prennent des décisions ou mènent le groupe, alors qu'elles n’ont pas demandé à avoir un rôle actif.
  • D’exiger de façon stricte qu’ils ou elles parlent comme leurs personnages ou soient particulièrement attentifs lors des combats. Pas de « trop lent, passe ton tour » !
  • D’encourager les personnalités dominantes à diriger - ou pire, râler sur - les personnes en retrait pour qu’elles adoptent des tactiques efficaces. Certains se contentent parfaitement d'enchaîner des attaques de base** pendant toute une séance.
** J’ai observé que la plupart des classes simples centrées sur les attaques de base comme le roublard et le guerrier correspondaient parfaitement aux observateurs.

Les instigatrices

Le cauchemar de nombreux MJ ; les Instigateurs.trices sont toujours à l'affût de l'élément précis qui peut faire dérailler une préparation minutieuse. Par exemple, demandez à mon ami Yan qu’il vous raconte la fois où j’ai réussi à sortir mon barbare de la battlemap, juste un tour avant qu’elle n’explose comme c'était prévu et détruise le trésor du dragon.

Cependant, une Instigatrice peut aussi être votre meilleure alliée pour faire avancer les choses à un rythme incroyable.

Quand les joueuses et les joueurs vous rendent perplexes, vous devriez :

  • Émailler leurs aventures de nombreux indices, accroches, leviers, boutons et autres pancartes « Ne pas toucher » et « Ne surtout pas ouvrir ».
  • Parsemer les rencontres d'éléments qui semblent d’abord follement dangereux mais qui permettent de sauver la peau de tout le monde lorsqu'on les utilise.
  • Être prêt à remettre en cause les limites de ce qui est socialement admis dans le groupe. À vous de décider quels comportements sont acceptables ou non à cette table.

Évitez de :

  • Considérer les instigateurs.trices comme vos ennemis. Exploitez plutôt l’énergie et l’impulsion qu’ils ou elles apportent pour faire avancer l’histoire.
  • Préparer des rencontres de combats trop proches les unes des autres dans un donjon, au cas où un Instigateur les déclencherait « accidentellement » toutes d’un coup.
  • Empêcher les actions d’un personnage parce qu'elles changeraient le déroulement prévu des évènements. Les instigateurs vous en voudraient pour ça.

Bonus : le joueur égoïste

Une amie lectrice a commenté un article précédent, au sujet d’une autre catégorie de joueurs : celui qui exploite le jeu à son propre avantage. J’ai tendance à mettre de tels joueurs dans le même panier que ceux qui accaparent l'attention, ceux qui argumentent sans fin pour obtenir des avantages pour leur personnage et sont généralement des cons finis. Je pense que ces joueurs à l’égoïsme flagrant sont ce que vous pouvez trouver de plus toxique et de nuisible au plaisir de jouer, des deux côtés de l’écran.

Il y a un certain temps, j’ai écrit un article vraiment virulent (en) à ce propos. Si je devais le réécrire, ce serait sans doute sur un ton plus modéré, mais ma conviction profonde sur la façon de les traiter reste la même : ne tolérez pas de comportements exagérément égoïstes à votre table, et virez les récidivistes dès que possible.

Et mon plaisir à moi ?

Comme expliqué dans la première partie, le secret est de combiner votre propre style, qui va sans doute recouper celui de certaines de vos joueuses, avec celui des autres. Pour cela, ajoutez des éléments aux rencontres.

N’en abusez pas, n’essayez pas de satisfaire tout le monde en même temps : c’est un chemin qui mène à la folie et à la frustration pour tous. Essayez plutôt de répondre à la motivation de l’une ici, de deux autres là, et assurez-vous autant que possible que chacun ait été contenté au moins une fois toutes les deux séances. Cela va améliorer grandement le plaisir que les participant.es retireront de vos parties, et va diminuer le risque que votre campagne tombe à l'eau.

Un dernier conseil pour vous-mêmes : essayez de vous comporter plus comme un observateur. Vous trouvez du plaisir en créant des mondes, en participant à des batailles, en construisant des rencontres complexes et ainsi de suite. Mais c’est en facilitant le plaisir des joueuses et des joueurs que vous obtiendrez une véritable satisfaction. Soyez témoin de leurs fiertés et de leurs joies quand ils surmontent des rencontres stimulantes et interagissent avec les accroches d’une intrigue élaborée. J’ai connu des instants de joie intense quand mes joueurs fusionnaient complètement avec leurs personnages pendant plusieurs minutes, et où je n’avais plus qu’à les observer, les bras croisés derrière la tête, en acquiesçant simplement pendant qu’ils planifiaient la prochaine scène.

Merci de m’avoir lu.

Sélection de commentaires

dk - Peut-on faire plaisir aux power-gamers et aux bourrins en même temps ?

Salut, merci pour encore un bon article. Penses-tu qu’on puisse faire plaisir à ceux qui cherchent la puissance (power-gamers) et aux bourrins en même temps - en supposant qu’on ne puisse pas en partie fusionner ces deux groupes ; je pense d'ailleurs que pour bourriner efficacement les rencontres, la plupart vont investir un peu dans la recherche d’avantages tactiques ?

S’il y a peu ou pas de grosbills dans un groupe, je peux imaginer que l’approche « une fois toutes les deux séances » fonctionne. Mais avec un groupe comprenant un échantillon plus représentatif des styles, il me semble que seuls les grosbills et les bourrins/grosbills réussiront dans un combat difficile.

Réponse de l’auteur

Salut dk,

J’espère comprendre correctement ta question. Les bourrins et les grosbills peuvent tout à fait être satisfaits en même temps ! En général, les joueuses motivées par l’un sont souvent au moins en partie motivées par l’autre. Les combats font gagner de l’expérience, et de nouvelles capacités rendent les personnages meilleurs au combat. Ne t'inquiéte pas trop pour ça.

Un combat vraiment difficile, à condition qu’il soit introduit pour une raison importante dans l’histoire, et qu’il y ait plusieurs façons de le remporter en dehors de « tuez tous les monstres », va généralement amener toute le groupe à participer activement, quelles que soient les préférences individuelles … s’il n’est pas trop tard et qu’il n’y a pas déjà eu 4h d’escarmouches et autres combats sans importance.

karat

Merci pour ces articles ! En tant que MJ encore jeune (enfin près d’un an déjà, le temps file !), je les apprécie beaucoup.

Mes joueurs semblent tendre particulièrement du côté des tacticiens. Pour qu’ils continuent de s’amuser, j’essaie parfois de créer des rencontres de combat où le but n’est pas juste d’éliminer tous les adversaires.

Par exemple : défendre le groupe de paysans attaqués alors qu’ils traversent la rivière, ou empêcher autant que possible les renforts ennemis d’approcher. Ça semble toujours fonctionner assez bien.

Parfois j’arrive aussi à une partie sans savoir à l’avance comment le groupe va pouvoir se sortir du pétrin. Je leur fais simplement confiance pour trouver une idée ingénieuse, mais je trouve que c’est un peu facile, alors j’essaie de ne pas en abuser.

Tom

Je pense qu’on devrait faire une distinction au sein de la catégorie des conteurs.

On devrait distinguer:

  • Ceux qui veulent participer à une plus grande histoire, comme on regarde une bonne série TV, comme dans une campagne avec une trame narrative plus ou moins pré-établie.
  • Ceux qui veulent construire une grande histoire, ou les options restent toujours ouvertes, ce qui est AMHA l’élément si unique de notre passion.

Ça fait une différence énorme, qui peut radicalement changer le comportement du MJ, d’un rôle de réalisateur à celui de négociateur des situations ouvertes.

Je ne sais pas comment on pourrait inclure dans ta typologie :

  • les architectes et l'audience ?
  • ceux qui perturbent et ceux qui collaborent ?
  • ceux qui vivent l’histoire et ceux qui la créent ?

highbulp

A ma table, j’ai trouvé que l’« observationisme » est plutôt contagieux, en particulier en « décrochant de la partie pour regarder leur téléphone ». Les joueurs arrivent aux parties pour passer du temps avec des copains, mais en dehors de leur tour (ou s’ils ne sont pas intéressés par ce qui se passe, parce qu’ils sont là seulement pour voir du monde), ils se tournent vers les smartphones ou ordinateurs et décrochent. Et pour une raison quelconque (peut-être parce que ça parait maintenant acceptable), même les joueurs les plus actifs commencent à le faire aussi.

Et dès qu’une seule joueuse décroche, ça sape complètement l’énergie de la table. Les joueur.euses trouvent difficile de susciter l’enthousiasme ou de faire émerger des plans et des idées quand un quart du groupe ne fait pas attention ou s’en fiche. Et plus radicalement, ça sape mon énergie de MJ, puisque j’ai l’impression qu’un quart du groupe ne s’amuse pas, ce qui me jette à la figure mon échec comme facilitateur du plaisir de jouer. Alors je perds de l’énergie, je m’épuise, et tout s’écroule.

Je n’ai rien contre les personnes qui restent en retrait et observent, et c’est super que des digressions et de la socialisation aient lieu. Mais ce truc de « jouer en étant sur le téléphone » me rend fou, et je demande plutôt fermement que les participants laissent ces trucs de côté quand on est supposé jouer.

(Ça vaut la peine de noter que dans notre groupe, les observateurs se sont finalement séparés des autres pour avoir leur propre réunion sociale dans la même pièce que nous en train de jouer. Ainsi tout le monde se retrouve, avec simplement des activités séparées. Peut-être était-ce juste une façon de résoudre notre dynamique de groupe)

Article original : Zen and the Art of Dungeon Mastering #3: Mind your Players’ Styles - part 1, part 2, part 3, part 4

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Pour aller plus loin…

Une typologie des joueurs de jeux de rôle (en 12 catégories), par le Ludomancien, et un atelier utilisant cette typologie pour apprendre à connaître vos joueurs en session zéro.

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