Critique de : Sins of the Father

Je n’aime pas lire des livres de règles. Mais j’ai répondu présente au mail groupé de notre Sombre Koordinator (1) demandant si une de nos Âmes était volontaire pour une mission « Service de presse pour l’éditeur Barbu ». Il m’a eue aux mots « atypique », « Horreur », « humour noir » et « système simple […] avec des cartes ». Bon, l’attente commençait et elle ne fut pas si longue car voilà déjà le livre sagement déposé dans ma boîte aux lettres. Y’a plus qu’à. Heureusement, le bouquin est pas bien épais.

L’objet

De format A5, le livre fait 90 pages. La 1re et 4e de couverture évoquent un album de métal, avec motif tribal et fumée. Le titrage me fait plutôt penser à l’univers des pirates : lettres effacées, à empattements et irrégulières… J’ai vu mieux pour de l’ambiance sombre, mais on reste dans un esprit fantastique, pourquoi pas.

En feuilletant, la mise en pages est sans surprises : texte justifié sur une colonne. Mais c’est lisible et les titres sont hiérarchisés. Il y a quelques illustrations, en noir et blanc, dans un style comics, mais sympa et bien réalisées.

Pour les non-anglophones, le titre Sins of the Father pourrait être traduit par Les Péchés du père.

La promesse du jeu

En lisant la 4e de couverture, on apprend que l’Âme de notre personnage a été vendue avant sa naissance : nos parents ont décidé à notre place de notre vie de servitude, au service d’un Sombre Seigneur, comme ce fut le cas pour les générations précédentes de notre famille. Dans ce jeu annoncé comme porté sur l’humour noir et l’excentricité, la promesse est de faire explorer à nos personnages les recoins les plus sombres de l’âme humaine en jouant avec moralité, conscience et péchés capitaux, grâce à un système simple et sans dés. Rien que ça. Un propos qui est à mes yeux prometteur, ça donne envie d’en lire un bout et d’y jouer, en appréhendant toutefois cette histoire de péchés capitaux que je ne trouve pas très originale pour l’instant.

Le livre s’ouvre sur une page qui n’est pas une page de titre, mais une page annonçant l’ambiance. C’est une lettre des parents du personnage. Une lettre d’anniversaire annonçant leur belle surprise : les âmes des membres de la famille ne leur appartiennent pas, elles appartiennent à leur Sombre Seigneur (dont, rappelons-le, on ne sait rien pour le moment, ce qui contribue à la mise en ambiance). Dans cette lettre, les parents sont très enthousiastes et vantent la belle vie luxueuse offerte par le Seigneur : « Comment crois-tu qu’on ait pu t’offrir un pick-up et te faire entrer dans cette université prestigieuse malgré tes résultats médiocres ? Eh bien, au prix de nos âmes, pardi ! » Quel prix imbattable. Ces révélations sont bien entendu annoncées par écrit dans une lettre et agrémentées d’une explication à propos de « tâches » à réaliser pour le Seigneur. Non, non, rien d’étrange, les parents disent même n’avoir « jamais regretté le marché » qu’ils ont signé et savent que leur enfant ne le regrettera pas non plus. « C’est pour ton bien. » Pas d’entourloupes : le Seigneur est d’ores et déjà annoncé comme le Maître (surprise !) de votre personnage. Allez, fêtons cela « tous ensemble autour d’un sacrifice. […] on va s’amuser ! »

En bref, une belle mise en ambiance. Une première page prometteuse qui annonce la couleur.

Entrée en matière

Sins of the Father est un jeu de Eloy Lasanta, traduit et édité en français par Barbu Inc. La VF comprend un scénario inédit écrit par Guillaume Manier. On se renseignera après lecture sur l’identité de ces Damnés et sur les autres individus ayant travaillé sur ce jeu, concentrons-nous d’abord sur le contenu.

Après la lettre et les crédits, on a un mot de l’équipe des Barbu annonçant que Sins of the Father est leur premier projet de traduction de jeu de rôle, et qu’ils l’ont choisi car il est comme la vie : drôle, violent, moralement ambigu ou choquant, cynique… avec une mise en exergue des failles des personnages. Non, plutôt que de simples failles, on parle là « de véritables abîmes vertigineux ». Espérons que ce livre ne soit pas tombé dans l’abîme de la surenchère et dans le syndrome « trodark ».

Je déplore qu’il n’y ait pas de sommaire. Il y a en revanche un index en fin d’ouvrage.

Le chapitre 1 s’ouvre sur un paragraphe expliquant que le Sombre Seigneur dont parlait la lettre peut être un démon, le Diable, un vampire… toutes sortes d’entités. Le Pacte peut avoir été signé directement par les parents du personnage ou par des générations antérieures – il peut donc être très récent ou très ancien.

On apprend également que les cartes, qui servent à jouer, représentent le contrôle du personnage sur sa Destinée. Lors de l’accomplissement de son destin ou de sa fin tragique, le personnage lègue sa Dette à ses enfants et le joueur ou la joueuse est invité.e à endosser le rôle d’un de ses enfants (ou un des enfants du personnage d’un autre joueur). Chaque génération assume alors les conséquences de ce Pacte, avec une Dette plus ou moins lourde selon les actes de ses parents. Bien sûr, plus la Dette est lourde, plus il est difficile de sortir de l’emprise du Sombre Seigneur. De toutes façons, c’est une emprise que peu sont capables de briser, car les Sombres Seigneurs sont des Maîtres ingénieux.

C’est une bonne idée qui apporte de la rejouabilité cohérente, c’est donc un jeu qui s’apprécie mieux en campagne. Cette histoire de lignée Damnée en est un élément central : il questionne la cupidité humaine qui peut pousser à vendre l’âme de ses propres enfants. Sans leur consentement bien sûr, sinon c’est pas drôle. Tiens d’ailleurs, ça ne nous rappellerait pas un peu la société de la vraie vie depuis l’invention de l’enfance ? (2)

777, le chiffre du Sombre Seigneur ?

Ce premier chapitre poursuit sa présentation du jeu par les demandes communément faites aux Sombres Seigneurs. Vengeance, gloire, santé, amour… Vous savez, ces choses pour lesquelles les êtres humains sont prêts à se Damner ? À partir des 7 catégories ainsi définies, on comprend pourquoi un être humain serait prêt à vendre son âme et celle de ses enfants : pour obtenir beaucoup de choses durant sa vie, et en retour s’endetter sur plusieurs générations.

Bon, il y a tout de même une bonne nouvelle pour les personnages : les avantages reçus par un Damné sont transmis en même temps que la Dette. Louée soit la générosité de votre Seigneur ! Ce n’est pas un Fardeau, c’est une Bénédiction qu’il vous offre ! Vous voulez mettre fin à ces avantages ? Eh bien, ce sera la fin de votre lignée, mes chers petits personnages conDamnés.

Comme on ne s’arrête pas là avec le chiffre 7, l’auteur passe à une section traitant des 7 Péchés Capitaux.

Le jeu est centré sur ces 7 Péchés, des vices Bibliques plutôt connus (3). Un être humain capable de signer un tel pacte est soumis principalement à un de ces péchés. Ça justifie le propos du jeu et ces vices sont assez connus pour être vite compris donc… pourquoi pas. Chaque Péché est présenté en un petit paragraphe accompagné d’un proverbe ou d’une citation bienvenue pour remettre une couche d’ambiance. Sympa.

On trouvera plus loin, dans la section du Maître (ou Maîtresse) des Âmes (MA), des suggestions d’actions et de narration liées à chacun des Péchés. Ce qui permet de savoir « comment motiver les PJ » et ainsi rapidement commencer à jouer sans tomber à court d’idées. Qui a dit que la Gourmandise ne concernait que la consommation alimentaire ? Ces sections sur les Péchés sont des lectures courtes et intéressantes, même en dehors du cadre rôliste.

Le premier chapitre se termine sur deux petites histoires qui nous replongent dans l’ambiance et montrent une troisième voie possible pour les personnages : ils peuvent bien sûr décider d’asservir et endetter toute leur famille ou bien tenter de rompre le pacte en la détruisant au passage ; mais ils peuvent aussi essayer de mettre un terme au pacte en se sacrifiant eux-mêmes. Cacher la Dette à vos enfants et accomplir les missions à leur place, vous croyez que ça peut vraiment fonctionner ? Essayez…

C’est une bonne idée de finir un chapitre de mise en ambiance (sans informations sur la mécanique de jeu pour l’instant) sur ces petits récits qui permettent d’imaginer le genre d’histoire créée durant une partie.

Règles et mécanique

Pour jouer, il vous faut un paquet de cartes standard par participant.e. Le jeu est basé sur de la pioche en opposition entre joueur.euses et Maître.sse des Âmes, pour chaque action importante (« conflit »). Le nombre de cartes piochées est calculé selon la difficulté de l’action et le niveau de compétences du personnage concerné.

La carte possédant la valeur la plus forte l’emporte, sauf en cas de joker ! Lorsque c’est le ou la MA qui gagne, le personnage est blessé. Lorsque le ou la MA pioche un As, le personnage est éliminé mais cela ne signifie pas toujours sa mort, cela peut simplement vouloir dire qu‘il ne peut plus agir pendant la scène. Une élimination a aussi lieu lorsqu’un personnage a reçu de trop nombreuses blessures.

Certains points de règles mériteraient d’être éclairés par une aide de jeu, notamment la pioche des jokers, car il est noté tout au long du texte que les joker noirs et rouges sont tous les deux néfastes à l’action du personnage, alors qu’un petit tableau indique que le joker rouge serait une réussite automatique.

Un bon point pour ce jeu qui n’a ni chiffres ni caracs ! Vous pouvez bien sûr annoncer que votre personnage utilise des armes, mais cela ne sera que narratif et indiquera le niveau de violence souhaité dans la scène. Le Seigneur exige que vos personnages cambriolent un lieu ? Eh bien, le choix d’emporter des cordes à piano ou des fusils à pompe dépend de vous et aura un impact sur l’histoire, mais vous n’aurez pas à faire de calculs. Pour les groupes qui tiennent à chiffrer les attaques armées, un conseil est donné au MA pour donner un bonus ou malus pendant l’action en fonction du personnage et de l’arme. Cette option a le mérite d’exister.

 

 

Damner son âme en 4 étapes

La création de personnage est rapide et se fait en 4 étapes :

  1. Déterminez votre Péché Originel en piochant deux cartes, reportez-vous à la table aléatoire et choisissez un des deux Péchés piochés. Vous ne voulez d’aucun des deux ? Refusez en disant « Va chier » et vous obtiendrez la Paresse !
  2. Piochez quatre cartes et choisissez-en deux pour déterminer vos Traits. Avec un peu de chance, votre personnage pourrait être Loyal, Méthodique ou même Ponctuel… mais il y a bien plus de probabilités que vous piochiez des cartes vous donnant un personnage Ingrat. Notez que ces Traits sont évidemment publics et vous connaissez donc ceux des autres PJ ; n’hésitez pas à en jouer lors des interactions entre personnages ! Personne n’aime parler aux calculateurs cyniques, faites-leur comprendre.
  3. Piochez encore et découvrez quelles sont vos relations de départ avec deux PJ et deux PNJ. Pour une Relation entre deux PJ, chaque joueur.euse pioche 1 carte et le duo choisit ensemble laquelle garder. Pour une Relation entre PJ et PNJ, le joueur ou la joueuse pioche 2 cartes et en choisit une. Ah, cela assure une implantation rapide dans le groupe et dans le jeu. Cette histoire de Relations lors d’une création de personnages est toujours une bonne idée ! En plus, la plupart des relations piochées seront malsaines… que demander de plus ?
  4. Choisissez 3 compétences parmi les 10 existantes. C’est bien suffisant pour tout type d’action, et les compétences sont rapidement décrites pour comprendre ce qu’elles englobent : Bricoler comprend le démarrage sans clef d’une voiture et le piratage d’un ordi, Convaincre inclut séduction et intimidation, Savoir permet de connaître des faits historiques et de mener une expérience scientifique, etc.

Et voilà ! Il aura suffi de piocher 8 cartes au total, de faire quelques choix, et voilà votre amusant personnage prêt à servir son Seigneur.

Savoir auprès de qui on a damné son âme… en 3 nouvelles étapes. Hum : 4+3=7, le compte est bon !

Après la création des personnages, les joueurs et joueuses passent à la création de leur Sombre Seigneur. Avec encore une fois une belle part d’aléatoire :

  1. Tout le monde pioche une carte depuis sa pioche personnelle pour choisir ensuite collectivement deux Traits ;
  2. Le ou la MA pioche deux cartes et fait choisir au groupe la façon dont le Seigneur communique parmi ces deux options. Pourquoi ne pas graver ses ordres dans la peau de ses larbins à distance ; n’est-ce pas un moyen amusant de communiquer ?
  3. Le ou la MA pioche deux cartes, les garde cachées et choisit entre les deux options le type de Sacrifices qu’il préfère (oups : qui est le plus approprié au groupe !)… Puis fait de même pour son Objectif ultime.

Il est aussi possible de choisir un des Sombres Seigneurs prétirés qui nous sont proposés : un.e vampire, une succube, une élémentaire, une « savant fou » et un démon. Chaque Seigneur prétiré a sa propre table aléatoire de requêtes, ce qui semble excellent pour lancer rapidement une session de jeu.

Après lecture, j’ai une préférence pour Xantor, le démon qui loge entre conscience et inconscience et se nourrit des cauchemars. J’ai été surprise par l’élémentaire : il s’agit de Gaïa la Corrompue, déesse de la Terre elle-même, en quête de vengeance contre l’humanité (et avide de sacrifices). Elle exigera des PJ des actions directes militantes et radicales mais aussi de purs actes criminels.

Comme pour les Sombres Seigneurs, des PNJ (« Figurants ») prétirés nous sont aussi proposés, pour un cadre contemporain.

Enfonçage pratique de portes ouvertes

Le quatrième et dernier chapitre est court. Les deux thématiques principales y sont rappelées : le conflit interne des personnages luttant entre leur humanité et leur devoir de servitude dans le cadre duquel ils sont fortement invités à effectuer des actes immoraux ; et la complexité de mener une vie secrète en parallèle d’une vie quotidienne banale.

Deux autres thématiques (et façons de jouer) évidentes y figurent également. Ce rappel explicite des thématiques est - à mes yeux - du pur enfonçage de portes ouvertes car elles sont présentes tout au long du livre. Mais si l’on a la mémoire qui flanche, une attention limitée, ou que l’on n’a pas l’habitude de ce type d’histoires, ça peut être pratique. Allez, un bon point pour ce petit chapitre.

 

(Re)Jouabilité

Pour apprécier la saveur de ce jeu, il semble qu’un one-shot ne suffirait pas. Il faut plusieurs séances pour développer les personnages, leurs relations mutuelles et celle qu’ils entretiennent avec leur Seigneur. Et puis, une fois que la mort les a rattrapés ou qu’ils prennent leur « retraite », c’est au tour de leurs enfants de prendre le relais… Des enfants qui peuvent être joués dans de nouvelles sessions de jeu !

À savoir que plus on avance dans les générations, plus il y aura d’individus concernés par la Dette. Et ces individus auront des réactions différentes face au lien d’esclavage imposé par cette Dette. Une chose amusante : si une de ces personnes rompt le contrat passé avec le Sombre Seigneur, cela impacte toute la famille. Eh oui, vous n’êtes pas à l’abri d’un cousin éloigné, jamais rencontré mais qui vous mène indirectement la vie dure sans qu’il vous connaisse ! Cela peut créer des relations intéressantes entre personnages-joueurs (PJ) mais aussi avec des personnages non-joueurs (PNJ). Et que se passe-t-il si c’est le Seigneur qui décide de vous donner à un autre Seigneur ? Après tout, il a tous les droits sur votre âme ! Vous voici alors entre les mains d’un nouveau « bienfaiteur »… qui ne prendra pas en compte tout ce que votre famille a déjà accompli, vu que ce n’était pas pour lui ! Dans une campagne, on peut imaginer bien des rebondissements de ce type. On peut redynamiser une histoire au long cours de cette manière.

Centré sur les conséquences d’un pacte impliquant une lignée toute entière, ce jeu peut prendre place à n’importe quelle époque en incarnant les membres d’une même famille et en gardant ou non le même Sombre Seigneur. Le pacte pouvant avoir été contracté des centaines voire des milliers d’années plus tôt, on comprend vite qu’on peut jouer à Sins of the Father aussi bien dans des temps très reculés que dans un futur très lointain. Les prétirés sont cependant écrits pour du contemporain, tout comme le scénario proposé, où les PJ doivent camoufler les preuves d’un crime, suite à la demande de leur Sombre Seigneur qui reste très évasif sur le sujet, surtout s’ils ne font pas preuve de curiosité. Tout ça se déroule dans une ville côtière en pleine célébration de festivités.

Un jeu perfectible

Dans une section dédiée au MA, on trouve quelques conseils, notamment le traditionnel « Alors, que faites-vous maintenant ? ». C’est une légère déception de voir cette phrase employée ici, surtout en ces termes assez peu « démoniaques ». J’aurais préféré un conseil disant d’embarquer plus directement les personnages dans l’histoire, par exemple en remplaçant la phrase :

« Si les joueurs [ne s’approprient pas d’emblée leurs personnages], il suffira au Maître des Âmes de leur demander "Alors, que faites-vous ?" »

Par

Si les joueurs [ne s’approprient pas d’emblée leurs personnages], il vous suffit de faire intervenir un PNJ : « Vous entendez des pas, il vaudrait mieux éviter qu’un être humain lambda vous découvre en plein rituel. Vous devez vite faire quelque chose ! » ou d’incarner directement le Seigneur si la scène s’y prête : « Eh ! Si vous restez plantés là sans agir, ça va mal tourner pour vous. Je vous ai ordonné quelque chose, déguerpissez et accomplissez ma volonté ! Ouste ! »

Remplacez bien sûr le mot « rituel » dans le premier cas par la situation de départ de votre scénario. Ce type de phrases contribuerait à l’ambiance et peut aider certains groupes à entrer dans le jeu in media res plutôt que de débuter par du méta-jeu.

La section réservée au MA contient toutefois de bons conseils, comme celui d’utiliser les Relations (PNJ) dans les scènes pour mieux impliquer les PJ, et de parfois laisser la main au groupe pour les descriptions de scènes.

En termes de mise en page, il est dommage que les entrées de chapitres ne se trouvent pas en belles-pages (sur des pages de droite) et que le livre soit dépourvu de titres courants, comme on en voit souvent dans les livres de JdR. Cela compenserait le manque de sommaire, rendrait la lecture plus agréable si on ne lit pas tout d’une traite et aiderait à la consultation après lecture, mais on les pardonne car le livre est fin.

Lecture plutôt rapide, texte plutôt aéré mais le corps du texte (sa taille) est parfois plutôt petit. On espère que vous avez des yeux en bonne santé !

Les Âmes dans l’ombre

Sins of the Father est un jeu de Eloy Lasanta grog publié sous son propre label Third Eye Games en 2016.

Derrière la version française de ce jeu, publiée début 2020, il y a l’équipe de Barbu Inc, une maison d’édition liée à Philibert, qui vend l'ouvrage à 15 euros. La mise en pages est de Fred Machu qui reprend celle de la version originale, avec des visuels issus de stock art (Shaman’s Stock Art sur DrivethruRPG.com) et des illustrations (originales ?) de Rick Hershey (rickhershey.carbonmade.com). La traduction de Barbu Inc est bonne, fluide et agréable à lire, même si une relecture orthographique supplémentaire aurait été bienvenue car il reste quelques fautes d’orthographe et d’inattention.

Dans l’ensemble ça reste plutôt correct. Une relecture sur maquette aurait été pas mal aussi pour quelques détails typographiques.

Le scénario est une addition à la VF (et on s’en réjouit), écrit par Guillaume Manier.

L'écran du MA, des feuilles de perso vierges et remplies sont disponibles en téléchargement barbu.

Conclusion : une promesse tenue

+ Une belle mise en ambiance grâce à la première page présentée sous forme de lettre (ce n’est pas un choix anodin de placer quelque chose à la place de la page de titres, et je dois avouer que c’est une belle idée réussie sur ce jeu).

+ Un jeu qui semble prometteur pour le genre qu’il souhaite émuler et l’ambiance qu’il souhaite créer. Des règles et un contenu textuel plus intéressant que son aspect visuel et sa conception graphique.

+ Un système basé sur la pioche de cartes, en opposition. Très peu de chiffres et de caracs, semble accessible au plus grand nombre.

+/- Un jeu qui aura plus de saveur en campagne, pour voir les personnages rembourser leurs Dettes ou bien s’enfoncer davantage dans l’emprise de leur Seigneur avant d’incarner la génération suivante qui héritera de ce servile héritage.

+ Les quelques tables aléatoires de création des Seigneurs sont vraiment amusantes et utilisables pour créer des PNJ (et pourquoi pas des PJ) pour d’autres jeux… et je ne me gênerai pas pour le faire prochainement.

- Une page imprimable résumant les règles serait plus que bienvenue, avec schémas, pictogrammes ou listes dans l’idéal. Cette page compléterait les fiches de personnages téléchargeables qu’on trouve sur le site.

- Un thème particulier, à discuter en groupe pour s’assurer que tout le monde souhaite y jouer. Une mention du concept de sécurité émotionnelle serait bienvenue car les thématiques sont variées et peuvent changer de session en session : violence physique (pouvant inclure mutilation et possession), sexe plus ou moins sordide, cultes et sacrifices…

+/- Des thématiques et une ambiance pouvant probablement mener certaines tables à de l’exagération, dans l’humour noir volontairement grotesque. Aurais-je apprécié ce jeu en étant plus jeune ? Certainement, mes personnages auraient foncé dans toutes les situations tête baissée pour précipiter leur chute dans une joie morbide, quels que soient le MA et le type de scénario. Pourrais-je apprécier ce jeu aujourd’hui ? Peut-être, mais pas sur n’importe quel scénario et en jouant plus sur les luttes internes du PJ que sur sa chute précipitée.

Un jeu qui tient donc sa promesse et prendra différentes formes selon le groupe. Explorez les recoins sombres de la moralité humaine en jouant subtilement avec les aspects inattendus des péchés ou enfoncez-vous allègrement dans les stéréotypes des péchés capitaux. Les deux sont possibles. Promesse tenue, à vous désormais de trouver le groupe qui vous convient pour un tel jeu.


(1) Note de l'Autrice : Le Sombre Koordinator est l’Ex-Grand Chef et Seigneur Innommable de Ptgptb. Il a laissé son trône à un de ses Damnés, lequel est bien occupé par sa vie quotidienne mais pourtant, gère d’une main de Maître notre groupe d’Âmes errantes. Mais on ne se débarrasse pas d’un Sombre Seigneur simplement en lui apposant un préfixe « Ex » ; il paraît qu’il rôde encore dans les parages et veille à ce que le groupe connu sous le nom « Traducteurs et Traductrices de PTGPTB (rejoignez-nous !) » ne sombre pas dans le Péché de Paresse. Fais chier, du coup on a deux Sombres Seigneurs sur le dos maintenant. [Retour]

(2) Note de l'Autrice : Oui oui, il y a quelques siècles, le concept d’enfance n’existait pas dans nos sociétés occidentales. Et encore moins le concept de jeunesse comme groupe social hétéroclite. Il y a plus de quatre siècles, on passait (en gros) de nourrisson/bouche à nourrir à « adulte miniature capable de nourrir les nouvelles bouches à nourrir ». Et dès l’invention de l’enfance, dans certaines classes sociales, un statut social intermédiaire fut créé pour désigner une période pendant laquelle l’adulte miniature serait un « enfant » inférieur aux adultes sans aucun droit sauf celui d’être sous la tutelle de ses parents – qui décident de son sort. Grosso modo. Ah vous vous attendiez à une note à propos de Dettes offertes de génération en génération dans notre société contemporaine ? Oh non, nous ne sommes ni un site politique ni un site militant ! [Retour]

(3) Note de l'Autrice : Ces 7 Péchés Capitaux sont les 7 vices identifiés par la chrétienté comme source de tous les mauvais comportements et par conséquent de tous les crimes. Ils découlent des « 8 pensées mauvaises » décrites par le moine Évagre le Pontique wiki au IVsiècle (la 8e « mauvaise pensée », qui a été ôtée, est l’acédie/le désespoir spirituel). [Retour]

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